Aujourdhui, il y a donc 2 mois et demi que mon fils est en IEF et ce matin, je lui ai fait passer une Ă©valuation de fin de sĂ©quence d'AcadĂ©mie en Ligne. Quand. Vous souhaitez rĂ©agir Ă  ce message ? CrĂ©ez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer. Accueil Rechercher . S'enregistrer Connexion : Le deal Ă  ne pas rater : Cartes PokĂ©mon Pixabay Philippe Broux Philippe Broux Contract Business Manager chez Orange Business Services Published Oct 6, 2018 A force de refouler ses Ă©motions, de se contenir, d'empĂȘcher de se lĂącher, d'Ă©viter d'exprimer ce qui nous gĂšne, nous agace, nous empĂȘche d'ĂȘtre alignĂ© avec soi mĂȘme, nous ne faisons qu'alimenter notre inconscient et renforcer, ce que Jung appelle, notre ombre. Dit autrement, cette ombre est composĂ©e de tout ce qu'on a refoulĂ© au fil du temps dans notre inconscient par peur d'ĂȘtre rejetĂ© par les personnes qui ont eu un rĂŽle crucial dans notre vie. A force de messages contraignants nos drivers comme "DĂ©pĂȘche toi, sois fort, pleure pas, attention Ă  ne pas..." nous nous empĂȘchons d'agir et refoulons. On encaisse. Si on ne cesse de gonfler le ballon de baudruche sans laisser s'Ă©chapper l'air... Pour rĂ©pondre aux souhaits des personnes qui nous entourent, ĂȘtre conforme Ă  ce qu'on attend de nous, nous portons souvent des masques qui dissimulent nos traits de caractĂšres plus profonds. Ces masques peuvent parfois se briser et agir comme rĂ©vĂ©lateur de nos ombres personnelles mais aussi d'un talent cachĂ©. Mettons la lumiĂšre sur nos ombres, ne serait-ce qu'en les reconnaissant. GĂ©nĂ©ralement notre ombre correspond Ă  ce qui rĂ©agir, irrite ou fait envie chez les autres . Tout Ă©vĂ©nement gĂ©nĂšre une pensĂ©e qui entraĂźne une Ă©motion et au final un comportement. Notre action, ou devrais-je dire notre inaction dĂ©pend bel et bien de ce que nous ressentons Ă  un instant T. Qu'est-ce ce qui fait que je n'ai pas envie de me rendre au boulot ce matin ? La rĂ©ponse n'est pas tant le fait de devoir se dire "allez je ne m'Ă©coute pas, j'y vais..." mais de comprendre ce qui fait que je n'ai pas envie de me lever pour m'y rendre...Qu'est-ce que cela signifie? Qu'est-ce qui m'angoisse, me perturbe, m'empĂȘche d'y aller ? Sachons accueillir nos Ă©motions. Prenons le temps de se rĂ©gler intĂ©rieurement pour mieux agir. Le musicien n'a t"il pas besoin d'accorder son instrument de musique pour jouer ? // L'estime de soi Jun 21, 2020 L'ombre sous les feux de la rampe May 23, 2020 L'Ă©motion. Transmetteur de message May 21, 2020 Osons l'audace May 11, 2020 Le fameux schĂ©ma du disque rayĂ©.. May 8, 2020 Savoir Ă©couter...pas si simple Feb 24, 2019 Coachez la bonne rĂ©ponse Feb 16, 2019 La PNL / Le coaching... Feb 3, 2019 "Prends le chemin qui s’appelle plus tard, tu arriveras sur la place qui s’appelle jamais." Jan 19, 2019 PrĂȘt ? Ah l'Ego Oct 18, 2018 Explore topics

2PremiĂšre ConfĂ©rence internationale de service social (Paris, 8-13 juillet 1928), Paris, 1928, 3 vol ; 5 Il est rare d’ailleurs que, dĂšs lors que les techniques sont Ă©voquĂ©es, les valeurs ou l’idĂ©al ne le soient aussi et le plus souvent dans l’ordre de l’inquiĂ©tude, comme dĂ©jĂ  en 1928 au cours de la premiĂšre ConfĂ©rence internationale de service social, premier grand

PubliĂ© le 24/08/2022 Ă  1616, Mis Ă  jour le 24/08/2022 Ă  1625 François Bayrou condamne les hurlements et les insultes qui polluent les dĂ©bats Ă  l'AssemblĂ©e nationale». Jean-Christophe Marmara / Le Figaro Je ne crois pas qu'une telle crise puisse ĂȘtre surmontĂ©e sans un immense effort national. Or l'idĂ©e mĂȘme d'un effort national semble souvent s'ĂȘtre effacĂ©e», affirme François Bayrou. Le prĂ©sident du MoDem François Bayrou estime, dans un entretien au Point publiĂ© mercredi 24 aoĂ»t, que la France va vers la crise la plus grave» qu'elle ait connue depuis la guerre», et qui ne pourra ĂȘtre surmontĂ©e sans un immense effort national».Cette prise de parole intervient le jour du Conseil des ministres de rentrĂ©e, au cours duquel Emmanuel Macron a une nouvelle fois insistĂ© sur la gravitĂ© des enjeux face Ă  la sĂ©rie de crises graves» sur le plan mondial, du conflit en Ukraine au dĂ©rĂšglement climatique.Effort national effacé»Mon sentiment profond est que nous allons vers la crise la plus grave que la France ait connue depuis la guerre», peut-ĂȘtre pire mĂȘme que la guerre d'AlgĂ©rie» 1954-1962, estime François Bayrou au Point. Je ne crois pas qu'une telle crise puisse ĂȘtre surmontĂ©e sans un immense effort national. Or l'idĂ©e mĂȘme d'un effort national semble souvent s'ĂȘtre effacĂ©e», juge le responsable centriste, Ă©galement Haut-Commissaire au Plan.J'ai parfois l'impression que le monde politique lui-mĂȘme ne se rend pas compte de ce qui vient, vu les hurlements et les insultes qui polluent les dĂ©bats Ă  l'AssemblĂ©e nationale», juge le patron du MoDem, alliĂ© au parti prĂ©sidentiel au sein d'une majoritĂ© relative Ă  l'AssemblĂ©e. Sur le plan international, François Bayrou cite le conflit en Ukraine, le risque de crise alimentaire notamment en Afrique, les tensions raciales aux États-Unis, la situation en Chine ou encore les Ă©lections en Italie, oĂč la cheffe du parti d'extrĂȘme droite Fratelli d'Italia Giorgia Meloni est en tĂȘte des sondages en vue des lĂ©gislatives du 25 septembre.NĂ©cessitĂ© d'une mutation»Il Ă©voque Ă©galement les problĂ©matiques liĂ©es Ă  la transition Ă©nergĂ©tique, la trĂšs forte inflation» et la question du dĂ©sĂ©quilibre de nos finances», dont plus personne dans l'opinion publique ne paraĂźt avoir vraiment conscience». Emmanuel Macron, assure François Bayrou, n'Ă©ludera aucune des questions cruciales de notre avenir». Il se situe d'avantage dans la question du moyen et du long terme que dans la gestion de l'immĂ©diat».À lire aussiÉdouard Philippe et François Bayrou, deux alliĂ©s de retour au premier planFrançois Bayrou rĂ©affirme par ailleurs le rĂŽle politique, plus indĂ©pendant et Ă  l'initiative» que doit avoir selon lui le premier ministre dans cette nouvelle configuration politique, comme il l'avait fait au lendemain des lĂ©gislatives, ce qui avait Ă©tĂ© perçu comme une critique du profil d'Élisabeth Borne. Je crois qu'Élisabeth Borne, intelligente et volontaire, l'a compris et qu'elle expĂ©rimente la nĂ©cessitĂ© de cette mutation», a-t-il VOIR AUSSI - Guerre en Ukraine la troisiĂšme guerre mondiale est une vraie menace», estime François Bayrou François Bayrou voit arriver la crise la plus grave que la France ait connue depuis la guerre» S'ABONNERFermerS'abonner AprĂšsdes rumeurs incessantes, c'est la crĂ©atrice qui s'est chargĂ©e de le confirmer via son compte Instagram, affirmant qu'aucune relation n'est un lit de Elena Tablada et Javier UngrĂ­a ont rompu leur relation aprĂšs six ans ensemble, quatre d'entre eux se sont mariĂ©s, en plus d'avoir une fille en communCamila, nĂ©e en avril 2020. TLFi AcadĂ©mie9e Ă©dition AcadĂ©mie8e Ă©dition AcadĂ©mie4e Ă©dition BDLPFrancophonie BHVFattestations DMF1330 - 1500 IDÉE, subst. A. − Ce que l'esprit conçoit ou peut Tout ce qui est reprĂ©sentĂ© dans l'esprit, par opposition aux phĂ©nomĂšnes concernant l'affectivitĂ© ou l'action. Les hommes ont des images avant d'avoir des idĂ©es; ils voient les corps avant de connoĂźtre les esprits Bonald, LĂ©gisl. primit., t. 1, 1802, p. 251.La danse est aussi rĂ©vĂ©lation et langage, car elle provoque inconsciemment ou rĂ©vĂšle volontairement des Ă©tats, des idĂ©es ou des sentiments intraduisibles par des mots Bourgat, Techn. danse,1959, p. 10.♩ Avoir l'idĂ©e reprĂ©senter. On a l'idĂ©e de point en considĂ©rant la marque faite sur une feuille de papier avec une aiguille ou la pointe d'un crayon bien taillĂ© Roux, Miellou, GĂ©om.,1946, p. 7 1. Dans les dessins, la fragmentation dĂ©voile la complexitĂ© de nos reprĂ©sentations les plus simples. L'idĂ©e que nous avons d'une harpe est la combinaison d'une grande quantitĂ© d'Ă©lĂ©ments images visuelles de bois dorĂ© pour le cadre, de lignes parallĂšles pour les cordes, de spirale comme ornement, d'images auditives, d'impressions personnelles, etc. Un enfant mis en prĂ©sence du dessin d'une harpe n'y voit rien d'autre que des Ă©lĂ©ments simples. Warcollier, TĂ©lĂ©pathie,1921, p. [Point de vue de la qualitĂ©, de la forme de l'idĂ©e] Avoir, se faire l'/une idĂ©e claire, complĂšte, exagĂ©rĂ©e, prĂ©cise de qqc. ou de qqn. Si l'on dĂ©couvrait ce journal, il donnerait de moi une idĂ©e fort inexacte, car je n'y mets guĂšre que ma vie extĂ©rieure Green, Journal,1936, p. 58 2. L'Empereur expliquait la nettetĂ© de ses idĂ©es et la facultĂ© de pouvoir, sans se fatiguer, prolonger Ă  l'extrĂȘme ses occupations, en disant que les divers objets et les diverses affaires se trouvaient casĂ©s dans sa tĂȘte comme ils eussent pu l'ĂȘtre dans une armoire. Las Cases, MĂ©mor. Ste-HĂ©lĂšne, t. 2, 1823, p. Concevoir, exprimer, se former une idĂ©e approximative, complexe, concrĂšte, confuse, distincte, imparfaite, insuffisante, nette, sommaire, superficielle, vraie; faible, vague idĂ©e; idĂ©e d'ensemble.− ReprĂ©sentation Ă©lĂ©mentaire, sommaire. Synon. aperçu, donner, se faire une idĂ©e de qqc. ou de qqn; ces chiffres suffisent Ă  donner une idĂ©e de; vous avez une idĂ©e de ce que cela peut ĂȘtre? Vous pouvez avoir une idĂ©e de mon ouvrage et de son Ă©tendue en jetant un regard sur la couverture que je joins Ă  ma lettre Balzac, Corresp.,1843, p. 600.Elle Ă©tait venue, comme ça, en passant, regarder les couronnes, pour se faire une idĂ©e. Elle demandait les prix Aragon, Beaux quart.,1936, p. 127.V. fĂ©minin ex. 7 3. La nature a percĂ© plusieurs rochers du globe, pour y faire passer des veines d'eau et des filons de mĂ©tal .... Pour donner une idĂ©e de ces aqueducs souterrains, je dirai deux mots de celui que j'ai vu Ă  l'Ile-de-France. Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 225.− Loc. diverses♩ Ne pas avoir l' idĂ©e, n'avoir aucune, nulle idĂ©e, ne pas avoir la premiĂšre, la plus lĂ©gĂšre, la plus petite idĂ©e de qqc. Ne pas connaĂźtre, ignorer totalement. Ceux qui le poursuivent exigent de cet homme qu'il Ă©prouve des sentiments dont il n'a mĂȘme pas l'idĂ©e Mauriac, Journal 2,1937, p. 140.Vous ne l'avez pas vu?... Vous n'avez pas la moindre idĂ©e de l'endroit oĂč je pourrais le joindre? Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 82 4. On proclama la rĂ©publique romaine du haut du Capitole, mais il n'y avait de rĂ©publicains dans la Rome de nos jours que les statues; et c'Ă©tait n'avoir aucune idĂ©e de la nature de l'enthousiasme que d'imaginer qu'en le contrefaisant on le ferait naĂźtre. StaĂ«l, Consid. RĂ©vol. fr., t. 1, 1817, p. 511.♩ Avoir, se faire l'/une idĂ©e de qqc. Imaginer. Donner une idĂ©e de qqc. Le faire concevoir, imaginer. Je pense souvent aux gens qui ont passĂ© des annĂ©es dans les cages de fer des prisons, au Moyen Âge, et je me fais un peu idĂ©e de leurs souffrances parce que je sais ce que c'est qu'une insomnie Aragon, Beaux quart.,1936, p. 478.J'ai idĂ©e des difficultĂ©s que vous avez rencontrĂ©es Lexis 1975.[Le plus souvent Ă  la forme nĂ©gative, p. exagĂ©r.] On ne peut, on ne saurait avoir, donner, se faire l'idĂ©e de; vous n'avez pas idĂ©e comme c'est agaçant, combien je suis heureux. Vous ne vous faites pas une idĂ©e de l'aplomb de ces gens-lĂ ! Zola, E. Rougon,1876, p. 202.On n'a pas idĂ©e oĂč la vanitĂ© d'une maĂźtresse de maison peut se nicher Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 24.Abs. Toute la journĂ©e attachĂ© lĂ , et rien, absolument rien Ă  faire! Au dĂ©but les heures me paraissaient longues, longues, tu n'as pas idĂ©e Martin du G., Thib., PĂ©nitenc., 1922, p. 714.Ne pas avoir, se faire d'/l'idĂ©e de qqc. vieilli. De loin nous ne nous faisons pas d'idĂ©e de ce que c'est que l'autoritĂ© d'un despote qui connaĂźt de vue tous ses sujets Stendhal, Chartreuse,1839, p. 264.V. agile ex. 34.♩ À la forme nĂ©gative, fam. [Pour exprimer la surprise, l'Ă©tonnement devant l'invraisemblance d'une chose, d'une action] On n'a pas idĂ©e ou a-t-on idĂ©e de + inf. ou subst..Il n'est pas concevable d'agir ainsi. On n'a pas idĂ©e de ça! On n'a pas idĂ©e d'une folie pareille! grommela la vieille dame. Se faire du mal pour du papier imprimĂ©! Miomandre, Écrit sur eau,1908, p. 138.Vous devriez avoir honte de parler d'un dĂ©goĂ»tant qui a Ă©tĂ© rĂ©voquĂ© pour mƓurs, espĂšce de dĂ©vergondĂ©e. A-t-on idĂ©e de faire rougir une femme de mon Ăąge! Ça ne vous portera pas bonheur Bernanos, Crime,1935, p. 816.V. apprendre ex. fam. On n'a pas idĂ©e! A-t-on idĂ©e? Est-ce possible? J'ai vu une Anglaise qui a passĂ© quelques jours chez des voisins Ă  eux; on n'a pas idĂ©e!... Elle se promĂšne dans son jardin presque toute nue H. Bataille, Maman Colibri,1904, IV, 1, p. 27.Je suis celle qui est lĂ  pour t'empĂȘcher de mourir, comme tu dis! de mourir, a-t-on idĂ©e! Claudel, Échange,1954, II, p. 763.♩ Fam. Avoir l'idĂ©e que, avoir comme une idĂ©e que, plus cour. avoir idĂ©e que. Avoir l'impression, croire, s'imaginer, penser que. J'ai toujours eu l'idĂ©e que vous arriveriez par moi aux honneurs et Ă  la fortune Scribe, Camaraderie,1837, III, 6, p. 300.Mon cher Berthier, j'ai l'idĂ©e que le ministĂšre tombera au dĂ©but de la session A. France, Lys rouge,1894, p. 333.Il s'est mis tout le monde Ă  dos. Nous n'avions pas idĂ©e qu'on pĂ»t Ă  ce point le dĂ©tester Claudel, PoĂšte regarde Croix,1938, p. 38.Rem. La docum. enregistre la constr. vieillie prendre une idĂ©e de. Synon. avoir, se faire une idĂ©e. Son ignorante vie avait cessĂ© tout Ă  coup, elle raisonna, se fit mille reproches. Quelle idĂ©e va-t-il prendre de moi? Il croira que je l'aime » Balzac, E. Grandet, 1834, p. 123. Il eĂ»t fallu voir, pour en prendre une idĂ©e, son front couvert de sueur, et cependant rĂ©signĂ©, ses yeux mouillĂ©s de larmes, et cependant levĂ©s au ciel Dumas pĂšre, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 374. Ce futur, qui est en elle Ă  l'Ă©tat de dĂ©sir et qu'elle n'a plus l'Ă©nergie de rĂ©aliser, cultive-le, prends-en une idĂ©e claire BarrĂšs, Homme libre, 1889, p. 131.b [Point de vue de la rĂ©sonance affective de l'idĂ©e]− [Le plus souvent au plur., suivi d'un adj. indiquant le degrĂ© affectif de l'idĂ©e] Leur prĂ©sence m'imposoit une mortelle contrainte, et rĂ©veilloit en moi des idĂ©es accablantes Genlis, Chev. cygne, t. 1, 1795, p. 115.Il nourrissait des idĂ©es grises, des idĂ©es noires, que sais-je? des pressentiments Gide, Caves,1914, p. 839.V. attaquer ex. IdĂ©e affreuse, agrĂ©able, atroce, chagrine, consolante, Ă©trange, gaie, importune, insupportable, souriante, terrible; idĂ©es douces, drĂŽles, lugubres, moroses, sinistres; ĂȘtre assailli de, chasser des, entretenir des, ĂȘtre portĂ© aux idĂ©es sombres; idĂ©es dĂ©goĂ»tantes, lubriques, malsaines, obscĂšnes, sordides.− Loc. verb., fam. Être dans ses idĂ©es. Être obnubilĂ© par qqc., avoir des idĂ©es noires. Ces diables de violons qui s'avisent de jouer cet air-lĂ  justement aujourd'hui, − quand je suis dans mes idĂ©es Murger, ScĂšnes vie jeun.,1851, p. 138.c [Point de vue du mode de relation de l'idĂ©e aux autres idĂ©es] EnchaĂźnement, liaison des idĂ©es; idĂ©es cohĂ©rentes, embrouillĂ©es, sans suite. Les foules sont inspirĂ©es par des associations d'idĂ©es trĂšs simples. Vous ne leur ferez pas faire une Ă©meute un jour de fĂȘte A. France, Bergeret,1901, p. 364.Il s'assit sur l'escabeau. Il n'avait plus une idĂ©e dans la tĂȘte. Les minutes Ă©taient lentes. Le temps se traĂźnait Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 98 5. Paris, 7 juin 1822. Cette soirĂ©e me fait l'effet d'un songe heureux, j'en suis encore tout enivrĂ©. Je cherche Ă  rassembler mes idĂ©es, je ne le puis le bonheur qui remplit mon Ăąme Ă©tourdit ma pensĂ©e ... » AmpĂšre, Corresp.,1822, p. a Mettre de l'ordre dans ses idĂ©es; sauter d'une idĂ©e Ă  l'/une autre; se changer, rafraĂźchir les idĂ©es Ă /de qqn; chasser, Ă©carter, Ă©loigner, repousser une/des idĂ©es. b Classification, combinaison, coordination, cours, fil des idĂ©es.− PSYCHOL., MÉD. Association* d'/des idĂ©es; fuite* des idĂ©es; idĂ©e fixe*; idĂ©es dĂ©lirantes*. d [Point de vue de l'objet de l'idĂ©e; le plus souvent suivi de de] Se faire Ă  une idĂ©e. Tout Ă  coup, il lui vient une idĂ©e qui la jeta dans un trouble inexprimable Jules allait croire que, comme son pĂšre, elle mĂ©prisait sa pauvretĂ©! Stendhal, Abbesse Castro,1839, p. 154.L'idĂ©e d'un emprunt lui revint, elle finit par accepter, Ă  la condition qu'elle lui rendrait ce qu'il dĂ©penserait pour elle Zola, Germinal,1885, p. 1243.La puissance de ce brasseur d'affaires dont l'existence Ă©veillait l'idĂ©e d'une torche en flamme, secouĂ©e par les vents, fumeuse mais Ă©blouissante Martin du G., Thib., Belle sais., 1923, p. 831.V. affĂ©terie ex. 5, blondeur ex. 4, cernure ex. 1 6. Les Anciens ont toujours senti que l'idĂ©e de la mort a sa voluptĂ©; l'amour et les fĂȘtes la rappellent, et l'Ă©motion d'une joie vive semble s'accroĂźtre par l'idĂ©e mĂȘme de la briĂšvetĂ© de la vie. StaĂ«l, Corinne, t. 1, 1807, p. 236.− L'idĂ©e de + subst. ou inf.; l'idĂ©e fait de se reprĂ©senter quelque chose. Être prĂ©occupĂ©, tourmentĂ© de/par l'idĂ©e que; la seule idĂ©e, Ă  la seule idĂ©e, rien qu'Ă  l'idĂ©e de, que. Annette avoit Ă©tĂ© effrayĂ©e par l'idĂ©e que M. de Durantal pouvoit ne pas avoir de foi en Dieu Balzac, Annette, t. 2, 1824, p. 127.Jean Valjean devint pĂąle. La seule idĂ©e de redescendre dans cette rue formidable le faisait frissonner Hugo, MisĂ©r., t. 1, 1862, p. 630.À l'idĂ©e que vous pourriez ne pas aller droit en paradis, j'en ai tout le corps qui tremble Zola, Dr Pascal,1893, p. 13 7. ... rien n'importe beaucoup de ce qui peut nous advenir sur terre, puisque la seule idĂ©e de ce qui nous attend plus tard suffit dĂšs maintenant Ă  nous combler de joie. Green, Journal,1938, p. La docum. et qq. dict. du xixeet xxes. enregistrent le sens vx, quasi-synon. de image, souvenir. Le scintillement des Ă©toiles, la clartĂ© de la lune, le calme profond qui m'environnoit, le parfum des fleurs, la nuit, l'heure, le mystĂšre, tout rappeloit Ă  mon cƓur un souvenir dĂ©licieux et dĂ©chirant... Les idĂ©es si chĂšres que me retraçoit l'imagination n'agissoient que sur mes sens; enivrĂ©, Ă©perdu, je n'en Ă©tois que plus infortunĂ© Genlis, Chev. cygne, t. 1, 1795, p. 208. Je demande pardon au lecteur de lui rappeler l'idĂ©e d'un pareil monstre, par des vers aussi misĂ©rables; mais il faut connoĂźtre l'esprit des temps Chateaubr., Essai RĂ©vol., t. 1, 1797, p. 155. Je l'aime de toutes les forces de mon Ăąme, et dans mon abandon complet, dans ma profonde douleur, il n'y a que son idĂ©e qui puisse encore m'offrir de la joie Hugo, Corresp., 1821, p. 326. Elle s'Ă©tonnait d'avoir trouvĂ© si ridicules les idĂ©es rĂ©veillĂ©es par le rĂ©cit de Madame de ThĂ©mines Stendhal, L. Leuwen, t. 3, 1835, p. 10.2. Ce qui n'existe que dans l'esprit, dans l'imagination, par opposition Ă  ce qui existe en fait, dans la rĂ©alitĂ©, de façon concrĂšte. Synon. chimĂšres, illusions, rĂȘves, avec ses idĂ©es. Il se repaĂźt d'idĂ©es LittrĂ©. Il nous a entretenu de ses idĂ©es Ac. 8. Ce ne sont pas des idĂ©es qu'il faut Ă  ce peuple remuant [le peuple français], mais des faits, des rĂ©cits historiques, des couplets et Le Moniteur! VoilĂ  tout jamais d'abstraction. Baudel., Salon,1846, p. 165.− Loc. fam.♩ Se faire une/des idĂ©ess; se mettre, se fourrer fam. des idĂ©es dans la tĂȘte, en tĂȘte. Imaginer des choses fausses, sans fondement. Pourquoi penser, ou dire du moins, que si tu me demandais Ă  Ă©couter ton drame, je ferais sourde oreille? VoilĂ  ce que je ne te pardonne pas. Ce sont ces idĂ©es que tu te fourres en tĂȘte Flaub., Corresp.,1847, p. 8.Il ne me croit plus, dit-elle avec dĂ©sespoir .... Il va me dĂ©tester Ă  cause d'une idĂ©e qu'il se fait BarrĂšs, Jard. Oronte,1922, p. 218.V. accrocher ex. 28 9. ... ils se disaient, en scrutant des yeux la nuĂ©e rouge de Verdun Il ne faut pas exagĂ©rer. De lĂ -haut on se faisait des idĂ©es. Tout ne brĂ»le pas. Loin de lĂ . Suffit de regarder. Il y a des incendies de cĂŽtĂ© et d'autre. Mais il y a des pĂątĂ©s de maisons, des carrĂ©s de bĂątiments qui continuent d'ĂȘtre bien sombres, bien peinards ... ». Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. iron. Synon. se faire des espĂšre recevoir des compliments, il se fait des idĂ©es Lar. Lang. fr.. ♩ Avoir des idĂ©es. Avoir en tĂȘte des fantasmes sexuels. Donner des idĂ©es Ă  qqn. Éveiller des fantasmes sexuels; exciter l'imagination de quelqu'un. Leurs bĂȘtises [des hommes] lui causaient si peu de plaisir, qu'elle restait sale exprĂšs, afin de ne pas leur donner des idĂ©es Zola, Pot-Bouille,1882, p. 265.Elle est comme toutes les mĂšres. Je lui dis parfois Mais tu les embĂȘtes, tes fils. Laisse-les donc tranquilles. C'est toi qui leur donnes des idĂ©es, avec toutes tes questions... » Gide, Faux-monn.,1925, p. 1114 10. Si vous avez ce qu'on appelle des idĂ©es... » ou plutĂŽt ... ce que l'on appelle vulgairement des idĂ©es... » il ne savait pas au juste ce qu'elle voulait dire. Peut-ĂȘtre la baiser sur la bouche, ou mĂȘme faire le mal avec elle. Green, MoĂŻra,1950, p. 220.♩ [Pour exprimer l'Ă©tonnement devant le caractĂšre non fondĂ© d'une affirmation, irrĂ©alisable d'un projet, insolite ou absurde d'une action, d'un comportement]En voilĂ  une drĂŽle d' idĂ©e! En voilĂ  des idĂ©es! Moi?... Ah! par exemple!... en voilĂ  des idĂ©es!... oĂč vas-tu chercher tout cela, mignonne? Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 109 11. le vĂ©rificateur Vous ne voudriez pas m'accompagner, dans ma prochaine tournĂ©e? Laurency, surpris Moi, en voilĂ  une idĂ©e! Lenormand, Simoun,1921, 7etabl., p. idĂ©e de + subst. ou inf. Mon Dieu! Que ces gens Ă©taient ridicules! Je sais bien que nous le serons autant qu'eux dans vingt ans, mais cette idĂ©e d'un troubadour avec un casque et une lyre! Colette, Cl. Ă©cole,1900, p. 231.− CĂ©lestine, soyez franche avec moi... Monsieur ne vous a jamais poussĂ©e dans un coin?... Il ne vous a jamais embrassĂ©e?... Il ne vous a jamais...? Non cette idĂ©e! Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 51.Et cette idĂ©e de se poudrer la nuque! Tout d'elle lui Ă©tait odieux Montherl., Bestiaires,1926, p. 404 12. Je trouve ta question stupide, − Marie-Louise Ă©tait agacĂ©e, − tu n'es pas juif que je sache, tu ne t'es jamais occupĂ© de politique... Tout le monde va rentrer Ă  Paris Ă  la fin des vacances, cette idĂ©e! Quand on n'est ni Allemand Ă©migrĂ©, ni Polonais, je ne vois pas pourquoi on ne rentrerait pas chez soi! Triolet, Prem. accroc,1945, p. idĂ©e avez-vous lĂ ! Sortir par un temps pareil, quelle idĂ©e! LittrĂ©. Moi, t'en vouloir! Quelle idĂ©e! Hermant, M. de CourpiĂšre,1907, II, 4, p. 16.Quelle idĂ©e a eue ce vieux respectable monsieur d'introduire dans sa maison un serviteur comme moi? Je vous demande suis-je ici Ă  ma place? Bernanos, Joie,1929, p. 543 13. − Vous souvenez-vous d'Adrienne? Elle partit d'un grand Ă©clat de rire en disant Quelle idĂ©e! » Puis, comme se le reprochant, elle reprit en soupirant Pauvre Adrienne » Elle est morte au couvent de Saint-S..., vers 1832. » Nerval, Filles feu, Sylvie, 1854, p. 626.− CrĂ©ation de l'esprit; ĂȘtre imaginaire. Synon. invention; apparence, fantĂŽme, mythe, donc que LĂ©lia? une ombre, un rĂȘve, une idĂ©e tout au plus Sand, LĂ©lia, t. 1, 183, p. 47.Des types vagabonds qui cherchent de la matiĂšre, ou bien des crĂ©atures s'Ă©vaporant en idĂ©es Flaub., Tentation,1856, p. 593 14. ... je me crĂ©ai un fantĂŽme de femme pour l'adorer. Je m'Ă©puisai avec cette crĂ©ature imaginaire, puis vinrent les amours rĂ©els avec qui je n'atteignis jamais Ă  cette fĂ©licitĂ© imaginaire dont la pensĂ©e Ă©tait dans mon Ăąme. J'ai su ce que c'Ă©tait que de vivre pour une seule idĂ©e et avec une seule idĂ©e, de s'isoler dans un sentiment, de perdre de vue l'univers et de mettre son existence entiĂšre dans un sourire, dans un mot, dans un regard. Chateaubr., MĂ©m., t. 4, 1848, p. 796.♩ [Pour exprimer le fait qu'une quantitĂ© est si petite qu'elle est presque inexistante] Une idĂ©e de + une larme, un poil, un rien, un scrupule, un Landry avait une idĂ©e de gaietĂ© et de courage de plus que son aĂźnĂ©, Sylvinet Ă©tait si fin d'esprit qu'on ne pouvait pas l'aimer moins que son cadet Sand, Pte Fad.,1849, p. 14 15. Le Soir de Paris s'est ... Ă©vaporĂ© il n'a pu lutter contre la naphtaline; il faudrait renifler la plinthe au-dessous de l'Ɠil-de-bƓuf, pour retrouver peut-ĂȘtre un reste de parfum, une idĂ©e de parfum. Bory, Mon Village Ă  l'heure allemande, Paris, Flammarion, 1945, p. 79.[EmployĂ© adverbialement] Culotte et pourpoint m'allaient comme un gant, bien qu'une idĂ©e larges ArĂšne, J. des Figues,1870, p. 64.La porte s'entre-bailla; oh! Ă  peine! un rien, une idĂ©e! tout juste assez pour qu'un mince fil de lumiĂšre tombĂąt du plafond au plancher Courteline, Conv. Alceste, Margot, 1888, p. 75.Excellents, les mouvements de MaĂźtres Chanteurs! Une seule fois, au moment d'attaquer la marche, ça allait une idĂ©e trop vite Willy, Bains de sons,1893, p. 193.3. [Avec mise en Ɠuvre de la puissance crĂ©atrice de l'intelligence] Conception de quelque chose Ă  Surtout dans les domaines artistique, littĂ©raire, originale et/ou fĂ©conde; premiĂšre conception de quelque chose; donnĂ©e fondamentale. On lui doit l'idĂ©e de cette machine Lar. 20e, Lar. encyclop.. L'Ɠuvre Ă  accomplir amĂšne nĂ©cessairement l'ouvrier le besoin donne l'idĂ©e, et c'est l'idĂ©e qui fait le producteur Proudhon, PropriĂ©tĂ©,1840, p. 226.Pour un grand artiste, l'idĂ©e, la vision d'un tableau peuvent jaillir de l'Ă©motion d'une lecture, et les plus beaux thĂšmes plastiques s'ordonner et s'Ă©panouir au rythme d'un poĂšme A. Michel, Peint. fr. xixes., 1928, p. 105 16. Toute la faiblesse et le manque d'originalitĂ© du romancier Bourget est dans l'aveu qu'il vient de faire que la conception de Suzanne Moraines lui a Ă©tĂ© inspirĂ©e par MmeMarneffe, de Balzac. Prendre l'idĂ©e d'un roman dans un roman, et ne la pas prendre cette idĂ©e dans un Ă©vĂ©nement humain ou une individualitĂ© caractĂ©ristique que vous avez cĂŽtoyĂ©e, lĂ  est ce qui distingue le romancier qui ne l'est pas de celui qui l'est. Goncourt, Journal,1888, p. a IdĂ©e centrale, dominante, essentielle, fondamentale, prĂ©pondĂ©rante, principale d'une Ɠuvre; idĂ©e directrice d'un Ă©crivain, d'un homme de sciences, d'une Ɠuvre; idĂ©e maĂźtresse, mĂšre. b Chercher, donner une idĂ©e de conte, de piĂšce. c Breveter une idĂ©e; dĂ©velopper, expliquer une idĂ©e.− En partic., domaine de la crĂ©ation artistique et littĂ©r. Esquisse, Ă©bauche. Jeter une/des idĂ©es sur le papier; ce n'est encore qu'une idĂ©e. L'idĂ©e premiĂšre, le croquis, qui est en quelque sorte l'Ɠuf ou l'embryon de l'idĂ©e, est loin ordinairement d'ĂȘtre complet Delacroix, Journal,1847, p. 169 17. Il est remarquable que, dans les premiĂšres idĂ©es du Dona, qui datent du temps du Credo − soit de 1820, − il ne soit aucunement question de l'assaut de la guerre − ou extĂ©rieure, ou intĂ©rieure. Rolland, Beethoven, t. 2, 1937, p. 416.− MUS. ,,Phrase musicale, d'ampleur variable, qui semble le noyau d'une Ɠuvre ou d'une partie d'une Ɠuvre et se prĂȘte Ă  des dĂ©veloppements ultĂ©rieurs`` Lar. encyclop.. Les dĂ©veloppements considĂ©rables [de cet allegro] roulent constamment sur la mĂȘme idĂ©e Berlioz, À travers chants,1862, p. 45 18. Le concerto qu'il nous a jouĂ© semblait tout entier fait pour lui. La robuste carrure du rythme, le puissant mouvement des idĂ©es, dans l'allegro et le finale, s'accordaient pleinement avec les qualitĂ©s de son archet et de son violon. P. Lalo, Mus.,1899, p. Cour. Conception neuve et/ou inattendue; solution originale Ă  un problĂšme. J'ai des tas d'idĂ©es fam.; c'est une idĂ©e Ă  lui fam.. Elle le fĂ©licitait de son bon goĂ»t − Ah! c'est mignon, extrĂȘmement bien! Il n'y a que vous pour ces idĂ©es » Flaub., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 69.Ne craignez rien; j'ai mon idĂ©e pour entrer Maupass., Contes et nouv., t. 1, Dimanches bourg. Paris, 1880, p. 309.Nanteuil dit qu'il fallait s'adresser au docteur Trublet. − C'est une idĂ©e! s'Ă©cria Pradel A. France, Hist. comique,1903, p. 153 19. Tenez! une idĂ©e me vient. Vous devriez faire une retraite de quelques mois, dans votre Auvergne, au sein de votre aimable famille... Bernanos, Imposture,1927, p. 422.♩ [Concerne Ă©galement I A 3 c] L'idĂ©e de qqc.; l'idĂ©e de faire fait de penser Ă , d'imaginer quelque chose et/ou le projet de quelque chose. Quelle bonne idĂ©e vous avez eue de venir aujourd'hui! Personne n'aura l'idĂ©e l'idĂ©e ne viendrait Ă  personne de vous chercher ici. C'Ă©tait, tout de mĂȘme, une Ă©trange mĂ©canique qu'une femme. Jamais il n'avait eu l'idĂ©e d'Ă©tudier cela. Il commençait Ă  entrevoir des complications extraordinaires Zola, E. Rougon,1876, p. 67.Notre curĂ© ... qui se croit un homme d'initiative, a eu l'idĂ©e d'un service pour les sinistrĂ©s de la Martinique Bloy, Journal,1902, p. 96.L'astrologie, qui eut l'idĂ©e gĂ©niale de rebaptiser les douze signes du zodiaque et de les remplacer poĂ©tiquement par les douze maisons du ciel Boll, Qq. sc. captivantes,1941, p. 194.V. coiffage ex. 1 20. La commode est une des crĂ©ations les plus intĂ©ressantes de l'Ă©poque [le xviiesiĂšcle]. Jusque-lĂ , le linge Ă©tait rangĂ© dans des coffres. Au xviesiĂšcle, les cabinets avaient rĂ©vĂ©lĂ© la commoditĂ© des tiroirs. Dans un coffre Ă  dessus fixe, surĂ©levĂ© sur quatre pieds, on eut l'idĂ©e de pratiquer des grands tiroirs. Viaux, Meuble Fr.,1962, p. a IdĂ©e allĂ©chante, bouffonne, dangereuse, diabolique, Ă©patante, Ă©tonnante, funeste, hasardeuse, heureuse, inapplicable, ingĂ©nieuse, lumineuse, machiavĂ©lique, neuve, saugrenue, sĂ©duisante, singuliĂšre, stupide; excellente, fameuse, malencontreuse, riche idĂ©e; drĂŽle d'idĂ©e; idĂ©e de gĂ©nie. b Lancer, pousser une idĂ©e; recueillir des idĂ©es. c [Concerne I A 3 b et c]. Une idĂ©e germe, naĂźt, jaillit; une idĂ©e est dans l'air, a de l'avenir, fait son chemin; une idĂ©e frappe, illumine, occupe; une idĂ©e se prĂ©sente, vient Ă  l'esprit; une idĂ©e traverse qqn, l'esprit, le cerveau, la cervelle, la tĂȘte; une idĂ©e entre dans la tĂȘte, passe par la tĂȘte; trotte dans la tĂȘte la cervelle, sort de la tĂȘte; une idĂ©e vient de qqn.♩ Souvent au plur., abs. [Concerne I A 3 a et b; pour insister sur le caractĂšre d'originalitĂ©, d'invention] Être dĂ©nuĂ©, dĂ©pourvu, plein d'idĂ©es; mĂ©diocritĂ©, pauvretĂ©, vide d'idĂ©es; une tĂȘte Ă  idĂ©es, boĂźte Ă  idĂ©es; les idĂ©es ne viennent pas. Le voilĂ  qui se met Ă  dĂ©velopper ce texte avec une abondance d'idĂ©es, une richesse de vues si fines ou si profondes, un luxe de mĂ©taphores si brillantes et si pittoresques, que c'Ă©tait merveille de l'entendre ChĂȘnedollĂ©, Journal,1822, p. 113.Je souffre ... d'un certain manque d'idĂ©es proprement dites, de vues, de vĂ©ritĂ©s, qui aprĂšs tout constituent la vraie richesse d'un esprit Amiel, Journal,1866, p. 59.Avoir des idĂ©es. Avoir l'esprit fĂ©cond, ingĂ©nieux 21. Il avait des idĂ©es. À dix ans il avait inventĂ© une trappe Ă  mouches, Ă  douze une nouvelle mĂ©thode pour gonfler les pneus de bicyclette, Ă  quatorze un moulin Ă  distribuer les cartes Ă  jouer. Queneau, Loin Rueil,1944, p. Intention, envie, dĂ©sir; projet. Avoir des idĂ©es intĂ©ressĂ©es; vous aviez bien une idĂ©e en me posant cette question? J'ai applaudi Ă  ses projets, je l'ai encouragĂ© dans ses idĂ©es de mariage Champfl., Souffr. profess. Delteil,1855, p. 240.Je me dĂ©cidai Ă  tout vendre, et me trouvai tout d'un coup ne plus possĂ©der que le cinquiĂšme Ă  peine de ce que j'avais hĂ©ritĂ© de ma grand'mĂšre .... On le sut d'ailleurs Ă  Combray ..., on se dit VoilĂ  oĂč mĂšnent les idĂ©es de grandeur » Proust, Fugit.,1922, p. 640.Il ne lui posait pas cette question dans l'idĂ©e d'Ă©couter sa rĂ©ponse, mais simplement pour lui crier sa colĂšre A. Chamson, Roux le bandit, Paris, Grasset, 1925, pp. 50-51 22. Un jour dans ses lointains voyages en Orient, s'Ă©tant Ă©loignĂ© de sa caravane aux environs d'Antioche, le jeune duc, en causant avec les guides du pays, entendit parler d'un mendiant dont on s'Ă©cartait avec horreur et qui vivait, seul, au milieu des ruines. L'idĂ©e le prit de visiter cet homme, car nul n'Ă©chappe Ă  son destin. Villiers de L' Contes cruels,1883, p. Abandonner, caresser, lĂącher, mĂ»rir une idĂ©e; reprendre une vieille idĂ©e; applaudir Ă  une idĂ©e; revenir Ă  son idĂ©e.− [Au sens fort] DĂ©termination, rĂ©solution. Avoir l'idĂ©e bien arrĂȘtĂ©e, avouĂ©e de faire qqc.; personne n'a pu lui ĂŽter cette idĂ©e de la tĂȘte. Elle prĂ©tend qu'elle est souffrante et que l'air de la campagne lui fera du bien... Vous savez, quand les femmes ont une idĂ©e, il n'y a pas Ă  aller contre Theuriet, Mais. deux barbeaux,1879, p. 97.Paule eut un petit rire Toi, quand tu as une idĂ©e dans la tĂȘte! Beauvoir, Mandarins,1954, p. 138.V. bachique ex. 7 23. Ah non! Jamais elle ne changerait d'idĂ©e. Ni sa mĂšre, ni personne ne lui arracherait un aveu. Rose-Anna voyait le visage de sa fille dans une petite glace posĂ©e au mur, au-dessus de la table. La bouche Ă©tait dure, le regard volontaire, presque insolent. Roy, Bonheur occas.,1945, p. N'avoir qu'une idĂ©e dans la tĂȘte, en tĂȘte; mettre, fourrer fam. une/des idĂ©es dans la tĂȘte de qqn; ne pas dĂ©mordre d'une idĂ©e; s'entĂȘter dans son idĂ©e; renoncer, tenir Ă  une idĂ©e; avoir de la suite dans les idĂ©es; une idĂ©e de derriĂšre la d'idĂ©e comme de chemise. V. chemise I A 2 Conception impliquant un jugement de valeur; maniĂšre de Point de vue en gĂ©nĂ©ral; opinion. Je n'ai pas d'idĂ©e lĂ -dessus; il a des idĂ©es sur tout. Il rĂ©alise l'idĂ©e vulgaire qu'on se fait du poĂ«te, ardent, impĂ©tueux, endettĂ©, inĂ©gal en conduite et en fortune Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 1, 1840, p. 182.Ce sont des idĂ©es d'enfant, qu'on ne peut faire les choses qu'avec excĂšs Montherl., Exil,1929, II, 8, p. 67.V. agricole ex. 20 et cautionner ex. 2 24. Il est Ă©vident qu'un paria hindou, un guerrier de l'empire Inca, un primitif de l'Afrique centrale, ou un membre des premiĂšres communautĂ©s chrĂ©tiennes n'avaient pas la mĂȘme idĂ©e de la rĂ©volte. Camus, Homme rĂ©v.,1951, p. a Avoir, donner, se former une bonne, grande, haute idĂ©e, une idĂ©e Ă©levĂ©e de qqc. ou de qqn; approuver, combattre, Ă©mettre, imposer, partager une idĂ©e; s'ouvrir Ă  une idĂ©e; confirmer qqn dans son idĂ©e; partir d'une idĂ©e, sur une idĂ©e fausse; avoir, rĂ©viser son idĂ©e sur qqn ou qqc. b IdĂ©e solidement ancrĂ©e, choquante, bien Ă©tablie, toute faite le plus souvent au plur., hardie, neuve, prĂ©conçue, reçue le plus souvent au plur., trĂšs rĂ©pandue, sensĂ©e.− Domaine de la mĂ©thode expĂ©rimentale.[Chez Cl. Bernard] IdĂ©e a priori ou prĂ©conçue. HypothĂšse la plus probable que l'expĂ©rimentateur Ă©met sur la cause d'un fait brut et dont la valeur est contrĂŽlĂ©e au moyen d'autres faits empruntĂ©s Ă  l'observation et Ă  l'expĂ©rimentation. La constatation du fait brut doit nĂ©cessairement prĂ©cĂ©der son interprĂ©tation, car c'est la vue du fait brut qui doit donner naissance Ă  l'idĂ©e prĂ©conçue ou Ă  l'hypothĂšse que l'on peut faire relativement Ă  sa cause C. Bernard, Princ. mĂ©d. exp.,1878, p. 55.V. circonstance ex. 4 et esclave ex. 6 25. ... le premier mouvement de l'esprit scientifique est une hypothĂšse ou une idĂ©e a priori Ă  l'aide de laquelle l'esprit s'Ă©lance au-delĂ  du fait brut pour arriver dans le champ du rationalisme qui est le vĂ©ritable terrain scientifique. C. Bernard, Princ. mĂ©d. exp.,1878p. 77.− ManiĂšre d'agir et/ou de penser; maniĂšre de voir.♩ À + adj. poss. + Ă  ma ta,... façon, Ă  ma ta,... guise; selon sa faire qu'Ă  son idĂ©e; juger, vivre Ă  son idĂ©e. Vous aurez cinq annĂ©es ennuyeuses c'est-Ă -dire cinq annĂ©es pendant lesquelles il vous faudra observer la rĂšgle, mais aprĂšs cela, vous en ferez Ă  votre idĂ©e Green, Journal,1943, p. 24.V. enfanter ex. 1.♩ À dans + adj. poss. + Ă  mon ton,... avis, selon ce que je tu,... penses.− À mon idĂ©e, il a Ă©tĂ© Ă©vacuĂ© par un autre rĂ©giment. − Mais non, il Ă©tait blessĂ©; les boches ont dĂ» le ramasser DorgelĂšs, Croix de bois,1919, p. 24.La lecture Ă©tant dans son idĂ©e une occupation purement dominicale, et trop noble aussi pour s'y adonner en habits de travail GuĂšvremont, Survenant,1945, p. 57.♩ Être de l'idĂ©e de qqn vx.Être de son avis. Quoique sans doute la petite soit de mon idĂ©e, il faut pourtant lui demander son avis Flaub., MmeBovary, t. 1, 1857, p. 26.b Au plur. Ensemble des vues ou opinions en tout domaine d'une personne ou d'un groupe de personnes. Tu as tes idĂ©es, j'ai les miennes; il a les idĂ©es de son siĂšcle. Les idĂ©es religieuses sont celles qui ont le plus de prise sur les ames sensibles SĂ©nac de Meilhan, ÉmigrĂ©,1797, p. 1911.Il faut tuer les gens qui n'ont pas vos idĂ©es? Sartre, Mains sales,1948, 5etabl., 2, p. 189.V. antipodique ex. 2, continuer ex. 12 et baigner ex. 9 26. Je pense quelquefois que, si les hommes du siĂšcle de Louis XIV pouvaient revenir au milieu de nous, avec leurs idĂ©es graves et leur forte raison, ils seraient bien Ă©tonnĂ©s de la maniĂšre dont on discute aujourd'hui les questions les plus importantes, et en vĂ©ritĂ©, j'ose croire qu'ils seraient moins frappĂ©s du progrĂšs des lumiĂšres que du progrĂšs des passions, et de l'affaiblissement des prĂ©jugĂ©s que de l'affaiblissement de l'intelligence. Lamennais, Lettres Cottu,1820, p. 100.♩ Entrer, ĂȘtre dans les idĂ©es de connaĂźt le prospectus, il entre dans les idĂ©es du marchand, il n'est pas fier Balzac, C. Birotteau,1837, p. 156.Vous savez, je ne vous suis guĂšre dans vos idĂ©es, dit Edmond. Je ne suis pas un partageux, et le socialisme me laisse sceptique Aragon, Beaux quart.,1936, p. 280.Tu m'as laissĂ© ĂȘtre des Ă©quipes de secours, oĂč il y avait un risque. Et tu m'interdis d'ĂȘtre de la rĂ©sistance, Ă  cause du risque. Est-ce que la rĂ©sistance ne serait pas dans tes idĂ©es? Montherl., Demain,1949, I, 2, p. 714.SYNT. a Accepter, accueillir, adopter, analyser, combattre, heurter, partager, professer, propager, respecter, soutenir, faire triompher des idĂ©es; fixer les idĂ©es sur un sujet; se rallier Ă  des idĂ©es; convertir qqn Ă , exposer ses idĂ©es; ĂȘtre acquis, hostile, ouvert Ă , touchĂ© par, imprĂ©gnĂ©s des idĂ©es de qqn. b Attachement, fidĂ©litĂ© Ă  des idĂ©es; communion, divergence, Ă©change, sympathie d'idĂ©es. c IdĂ©es d'un artiste, d'un Ă©crivain, d'une classe sociale, d'une Ă©poque, d'une gĂ©nĂ©ration, d'un homme politique sur qqc. ou en matiĂšre de; idĂ©es d'Ă©galitĂ©, de fraternitĂ©, de justice, d'ordre, de revendication, de rĂ©volte, de tolĂ©rance. d IdĂ©es esthĂ©tiques, littĂ©raires, morales, philosophiques, politiques, scientifiques, sociales; idĂ©es bourgeoises, monarchistes, libĂ©rales, progressistes, rĂ©formistes, rĂ©publicaines; idĂ©es fortes, gĂ©nĂ©reuses, nobles, philanthropiques, romanesques; idĂ©es arrĂȘtĂ©es, avancĂ©es, courtes, Ă©troites, rĂ©trogrades, subversives; ĂȘtre large d'idĂ©es; idĂ©es actuelles, modernes, nouvelles, pĂ©rimĂ©es, traditionnelles; idĂ©es Ă  la mode, de l'ancien temps, d'un autre temps, qui n'ont plus cours; grandes, hautes, vieilles idĂ©es.− Abs., au plur. L'ensemble du mouvement intellectuel concernant une Ă©poque, une civilisation. Courant, mouvement, progrĂšs des idĂ©es. Dans l'histoire des idĂ©es et des mƓurs, Jean-Jacques peut bien aujourd'hui apparaĂźtre, en face des philosophes, comme un mainteneur de la sensibilitĂ© religieuse GuĂ©henno, Jean-Jacques,1952, p. 124.V. cĂŽtoyer ex. 2 27. C'est Ă©noncer une vĂ©ritĂ© dĂ©sormais banale que de dire que ce sont les idĂ©es qui mĂšnent le monde. C'est d'ailleurs dire plutĂŽt ce qui devrait ĂȘtre et ce qui sera, que ce qui a Ă©tĂ©. Il est incontestable qu'il faut faire dans l'histoire une large part Ă  la force, au caprice, et mĂȘme Ă  ce qu'on peut appeler le hasard, c'est-Ă -dire Ă  ce qui n'a pas de cause morale proportionnĂ©e Ă  l'effet. Renan, Avenir sc.,1890, p. 23.− En partic., abs., au plur. Écrivain, littĂ©rature, théùtre d'idĂ©es. Écrivain, littĂ©rature, théùtre dont l'objet est de dĂ©velopper des idĂ©es, des thĂšses. V. flatter ex. de Apoll., TirĂ©sias, 1918, p. 866 28. [Dans la littĂ©rature modern style] les chroniqueurs du temps distinguent un théùtre d'idĂ©es », un théùtre d'amour », et un théùtre gai » .... D'excellents techniciens [du théùtre d'idĂ©es »], doublĂ©s d'observateurs aigus, mettent en scĂšne les problĂšmes sociaux, font de la satire des mƓurs Ă©lectorales, des manigances financiĂšres, des abus coloniaux, des mariages d'argent, des dĂ©nis de justice, de la fausse noblesse, ou de l'Ă©ternel Don Juan. P. O. Walzer, Litt. fr., Le xxes., Paris, Arthaud, 1975, p. 97.− Au plur. cour. et au sing. littĂ©r.. Direction d'une pensĂ©e, systĂšme doctrinal, idĂ©ologie; le ou les principes qui est ou qui sont Ă  la base de cette pensĂ©e, de ce systĂšme, de cette idĂ©ologie. L'idĂ©e monarchiste, rĂ©publicaine. L'idĂ©e fouriĂ©riste LittrĂ©. Dans cette insouciance du pays pour Charles X, il y a autre chose que de la lassitude il y faut reconnaĂźtre le progrĂšs de l'idĂ©e dĂ©mocratique et de l'assimilation des rangs Chateaubr., MĂ©m., t. 3, 1848, p. 670.Ce qui ruinerait l'idĂ©e marxiste, ce serait de vouloir que le progrĂšs technique ait dĂ©terminĂ© par lui-mĂȘme tous les changements de l'ordre moral Alain, Propos,1933, p. 1150 29. Quand l'idĂ©e de la palingĂ©nĂ©sie du monde se rĂ©pandit parmi les Juifs, toutes ces peintures d'un monde renouvelĂ©, d'une JĂ©rusalem nouvelle, vinrent s'appliquer Ă  cette palingĂ©nĂ©sie du monde, et donnĂšrent Ă  l'idĂ©e juive une prĂ©cision, une nettetĂ© comparable Ă  celle qui peut rĂ©sulter pour nous de la vue des choses manifestĂ©es et prĂ©sentes. P. Leroux, HumanitĂ©, t. 2, 1840, p. 720.− Au sing. ManiĂšre particuliĂšre de concevoir la vie, la sociĂ©tĂ©, la civilisation, que l'on Ă©rige en norme d'action ou que l'on donne pour but Ă  ses pensĂ©es et Ă  ses actes. Synon. y avait dans la Convention une volontĂ© .... Cette volontĂ© Ă©tait une idĂ©e indomptable et dĂ©mesurĂ©e qui soufflait dans l'ombre du haut du ciel. Nous appelons cela la rĂ©volution Hugo, Quatre-vingt-treize,1847, p. 188.Cet homme qui passait le premier, ce n'Ă©tait pas pour de l'argent qu'il venait tuer ceux qui se traĂźnaient lĂ -haut, c'Ă©tait pour une idĂ©e, pour une foi Malraux, Cond. hum.,1933, p. 385 30. Depuis son enfance qu'elle avait passĂ©e sous le chevet rose, vert et jaune de santa Maria del Fiore, elle Ă©tait habitĂ©e par l'idĂ©e monastique. Elle ignorait toute passion. C'est pourquoi elle avait choisi l'ordre le plus secret et le plus paisible, la Visitation de Mantoue. Jouve, Paulina,1925, p. Se dĂ©vouer Ă , mourir pour, se sacrifier Ă , servir une idĂ©e; ĂȘtre animĂ©, mĂ» par une idĂ©e; incarner une idĂ©e; l'idĂ©e chrĂ©tienne, rĂ©publicaine, alimenter, inculquer l'idĂ©e rĂ©volutionnaire, une idĂ©e humanitaire; une idĂ©e juste; une belle idĂ©e.♩ Au sing., abs., vx. ,,Ensemble idĂ©al des aspirations du gĂ©nie et de l'Ă©poque`` LittrĂ©. Les penseurs sont les serviteurs de l'idĂ©e LittrĂ© 31. Soyons frĂšres; ayons L'Ɠil fixĂ© sur l'IdĂ©e, ange aux divins rayons. L'idĂ©e, Ă  qui tout cĂšde et qui toujours Ă©claire Prouve sa saintetĂ© mĂȘme dans sa colĂšre! Hugo, ChĂątim.,1853, p. − Seulement au sing., souvent pop. et fam. L'esprit qui conçoit. Synon. imagination, intelligence, restait enfant trĂšs tard, ce qui impatientait Cadine. Il n'avait pas plus d'idĂ©e qu'un chou, disait-elle Zola, Ventre Paris,1873, p. 766.Soudain, et de concert, ils laissĂšrent tomber leurs bras au long de leurs cuisses, et s'interrogĂšrent jusque dans l'Ăąme et jusque dans l'idĂ©e Cladel, Ompdrailles,1879, p. 277.− [Le plus souvent prĂ©cĂ©dĂ© de Ă , dans, de, en avec ou sans dĂ©terminant] Se mettre qqc. dans l'idĂ©e; cela m'est sorti de l'idĂ©e; on ne m'ĂŽtera pas cela de l'idĂ©e. Il me vint en idĂ©e de me mĂ©nager un asile contre le dĂ©sespoir Restif de La Bret., M. Nicolas,1796, p. 91.Ma rĂ©solution Ă©tait prise et rien ne pouvait plus m'en faire changer. Il me vint bien Ă  l'idĂ©e que je pouvais ne pas ĂȘtre dans mon droit, mais je me moquai bien de cette idĂ©e A. France, Bonnard,1881, p. 473.J'ai dĂ©jĂ  dans l'idĂ©e un autre article sur un sujet merveilleux l'idĂ©e de continuitĂ© et ses applications dans l'art contemporain RiviĂšre, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1906, p. 123.− Loc. diverses♩ En idĂ©e. [P. oppos. Ă  en fait, en rĂ©alitĂ©] Synon. en est si doux, parmi les dĂ©senchantements de la vie, de pouvoir se reporter en idĂ©e sur de nobles caractĂšres, des affections pures et des tableaux de bonheur Flaub., MmeBovary, t. 1, 1857, p. 95.♩ Fam. Dans + adj. poss. + + adj. poss. + conception des choses. J'suis pas mariĂ© Ă  la mairerie... Mais j'suis mariĂ©... dans mon idĂ©e Benjamin, Gaspard,1915, p. 14.♩ Fam. Avoir l'idĂ©e Ă  qqc. Synon. avoir l'esprit, la tĂȘte Ă  qqc.; prĂȘter attention Ă  n'avait plus du tout l'idĂ©e aux femmes, parce qu'il faisait dĂ©jĂ  trĂšs froid; mais on rĂȘvait Ă  des choses incohĂ©rentes ou merveilleuses, comme dans le sommeil Loti, PĂȘch. Isl.,1886, p. 185.♩ Abs., pop. et fam. Avoir de l'idĂ©e. Être intelligent, avoir l'esprit plein de ressources. Caporal, demanda Pache, d'une voix un peu tremblante, vous qui avez de l'idĂ©e, si vous pouviez le tuer sans lui faire du mal? Zola, DĂ©bĂącle,1892, p. 450.Tu comprends, lui dit-il amicalement, t'as de l'idĂ©e, mais tu gueules pas assez DorgelĂšs, Croix de bois,1919, p. 28.II. − PHILOSOPHIEA. − [Souvent avec majuscule] Norme idĂ©ale, absolue, forme de la [Chez Platon et ses hĂ©ritiers] Ce qui appartient au domaine de l'intelligible et qui seul possĂšde la perfection Ă©ternelle et la rĂ©alitĂ© absolue. Le monde des IdĂ©es. Il [Platon] pose le monde des idĂ©es de façon que nous n'en soyons que la dĂ©gradation Du Bos, Journal,1924, p. 19.La philosophie platonicienne de l'IdĂ©e philosophie oĂč les IdĂ©es ... sont regardĂ©es comme des sortes d'entitĂ©s, existant sĂ©parĂ©ment des objets singuliers pour lesquels elles jouent le rĂŽle de paradigmes R. BlanchĂ©, La Log. et son hist., Paris, A. Colin, 1970, p. 22.V. archĂ©type ex. 2, abstraction ex. 19 et Ăąme ex. 32 32. La thĂ©orie platonicienne des idĂ©es peut ĂȘtre, au moment de la RĂ©publique, ramenĂ©e Ă  ces quatre formules les idĂ©es sont l'ĂȘtre; elles sont identiques et absolument distinctes; l'ĂȘtre est intelligible; l'ĂȘtre intelligible procĂšde de l'idĂ©e de bien. H. D. Gardeil, Les Étapes de la philos. idĂ©aliste, Paris, Vrin, 1935, p. 19.− P. ext., lang. cultivĂ©e. Type idĂ©al créé par l'esprit. Synon. sƓur divine ... ĂŽ fleurie, ĂŽ transfigurĂ©e! Tu n'es plus la petite Asiatique dont je fis ton modĂšle indigne. Tu es son idĂ©e immortelle, l'Ăąme terrestre de l'AstartĂ© qui fut gĂ©nitrice de sa race Louÿs, Aphrodite,1896, p. 41.♩ LITT. symbolisme. Forme Ă©ternelle de toute chose. Le poĂšte mallarmĂ©en ne prĂ©cipite toute matiĂšre dans le non-ĂȘtre que pour laisser subsister l'idĂ©e de l'objet disparu, sa forme seule parfaite, son essence immuable BĂ©guin, Âme romant.,1939, p. 382 33. Le PoĂšte pieux contemple; il se penche sur les symboles, et silencieux descend profondĂ©ment au cƓur des choses, − et quand il a perçu, visionnaire, l'IdĂ©e, l'intime Nombre harmonieux de son Être, qui soutient la forme imparfaite, il la saisit, puis, insoucieux de cette forme transitoire qui la revĂȘtait dans le temps, il sait lui redonner une forme Ă©ternelle, sa Forme vĂ©ritable enfin, et fatale − paradisiaque et cristalline. Gide, TraitĂ© Narcisse,1891, p. [Chez Kant; p. oppos. Ă  catĂ©gorie ou concept de l'entendement] IdĂ©e ou IdĂ©e a priori ou transcendantale; idĂ©es de la Raison pure. Concept nĂ©cessaire de la raison pure auquel ne peut correspondre aucun objet donnĂ© par les sens et qui rĂ©pond Ă  l'exigence d'unification de tous nos raisonnements. Les idĂ©es ne sont autre chose que des catĂ©gories pures Ă©levĂ©es Ă  l'absolu, et capables de se rapporter aux catĂ©gories ordinaires, de maniĂšre Ă  en prolonger sans limites l'application Ă  des objets d'expĂ©rience V. Delbos, La Philos. pratique de Kant, Paris, Alcan, 1926 [1905], p. 203 34. Les principes absolus, qui contiennent la totalitĂ© des conditions pour un conditionnĂ© donnĂ©, c'est-Ă -dire, au fond, qui contiennent l'inconditionnĂ©, ces principes sont l'Ɠuvre d'une autre facultĂ© que l'entendement. Kant les appelle idĂ©es transcendantales et les rapportent Ă  la raison. R. Verneaux, Les Sources cartĂ©siennes et kantiennes de l'idĂ©alisme fr., Paris, Beauchesne et fils, 1936, p. [Chez Hegel; p. oppos. Ă  concept subjectif] PensĂ©e absolue, objective, en soi, dont procĂšdent par dĂ©veloppement dialectique la Nature et l'Esprit d'apr. Foulq. 1971. La Nature est un moment de la vie de l'IdĂ©e, le moment oĂč elle s'extĂ©riorise avant de s'intĂ©rioriser dans l'Esprit E. BrĂ©hier, Hist. de la philos., Paris, 1968 [1932], tome 2, fasc. 3, p. 660 35. L'IdĂ©e [it. ds le texte], catĂ©gorie dans et par laquelle le concept de la subjectivitĂ© transcendantale et l'objectivitĂ© des sciences » se saisissent dans leur identitĂ© profonde et, du mĂȘme coup, dĂ©finissent libertĂ© et rationalitĂ© comme Ă©tant des termes exactement interchangeables. F. Chatelet, Hegel, Paris, Seuil, 1969, p. − Objet d'une certaine connaissance; simple mode de la [Chez Descartes et ses hĂ©ritiers] Ce qui est conçu immĂ©diatement par l'esprit. IdĂ©e adĂ©quate, adventice, claire, confuse, distincte, factice, innĂ©e, obscure. L'idĂ©e est une dĂ©termination de la pensĂ©e; elle est donc le premier objet immĂ©diatement connu R. Verneaux, Les Sources cartĂ©siennes et kantiennes de l'idĂ©alisme fr., Paris, Beauchesne et fils, 1936p. 122 36. Il [Descartes] abandonne mĂȘme le sens scolastique du mot idĂ©e signifiant les archĂ©types Ă©ternels par lesquels Dieu pense les choses pour dĂ©signer par idĂ©es les modes de la pensĂ©e humaine. L'idĂ©e est donc, chez Descartes, d'Ă©toffe mentale. F. AlquiĂ©, La DĂ©couverte mĂ©taphysique de l'homme chez Descartes, Paris, 1966 [1950], p. [DĂ©r. de 1; p. oppos. Ă  image] IdĂ©e ou IdĂ©e gĂ©nĂ©rale. ReprĂ©sentation intellectuelle, abstraite, gĂ©nĂ©rale, d'un objet. Synon. y a deux maniĂšres de modifier une idĂ©e, savoir dans sa comprĂ©hension ou dans son extension Destutt de Tr., IdĂ©ol. 2,1803, p. 104.V. abstrait ex. 3 et 4 37. Une idĂ©e gĂ©nĂ©rale est toujours une idĂ©e abstraite, et il n'existe pas d'idĂ©e abstraite qui ne soit abstraite d'une sĂ©rie d'expĂ©riences humaines. Gaultier, Bovarysme,1902, p. 113.− [Le plus souvent suivi de de + subst.] L'idĂ©e d'Ă©ternitĂ©, d'homme, de justice, de mouvement, de nature, de puissance, de quantitĂ©, de substance. Il suffit d'analyser l'idĂ©e de cause dans ses usages contemporains pour voir combien elle conserve de traces de ses diversitĂ©s originelles Lalande, Raison et normes,1948, p. 58.V. amoral ex. 6.♩ [Emploi didactique principalement dans les travaux universitaires] R. Folz, L'IdĂ©e d'empire en Occident du veau xivesiĂšcle. Paris, Aubier, 1953. Cf. Ă©galement supra I B ex. de premier terme de mots composĂ©s liĂ© ou non au second terme par un trait d' Le second terme dĂ©signe α La nature ou l'Ă©lĂ©ment moteur de l'idĂ©e. Je vous donne pour gage de ma foi, le spectacle inconnu au monde d'un roi acceptant le sacerdoce de l'Ă©poque nouvelle, apĂŽtre armĂ© de l'idĂ©e-peuple, architecte du temple de la Nation Sand, MĂ©l.,1843, p. 278.La rĂ©publique, votre foi, votre idĂ©e-patrie, puise une vie nouvelle dans vos tortures Hugo, Actes et par. 2,1875, p. 52. ÎČ L'objet, la destination de l'idĂ©e, en partic., dans le vocab. de la publicitĂ©. IdĂ©es-vacances spĂ©ciales-zone-franc-tout-compris PublicitĂ© Air-France ds cadeau peut-ĂȘtre pas totalement nouvelle mais vraiment jolie, une gourmette de bĂ©bĂ© en or, Ă  chaĂźnette Elle,4 dĂ©c. 1972, p. 136.b Le second terme α SpĂ©cifie la nature ou le type particulier de l'idĂ©e. Le mot est cet ĂȘtre Ă©trange une idĂ©e-chose. Il possĂšde Ă  la fois l'impĂ©nĂ©trabilitĂ© de la chose et la transparence de l'idĂ©e, l'inertie de la chose et la force agissante de l'idĂ©e Sartre, Sit. I,1947, p. 221.En face d'un rĂȘveur de pensĂ©es savantes, comme fut Robinet, qui organise ses idĂ©es-visions en systĂšme, un psychanalyste habituĂ© Ă  dĂ©lier des complexes familiaux serait bien inopĂ©rant Bachelard, PoĂ©t. espace,1957, p. 113.V. Ă©clair C ex. de Benda, Fr. byz., 1945, p. 245. En aux qualitĂ©s premiĂšres des corps, parmi elles il en est une, savoir la figure, qui semble propre Ă  ĂȘtre reprĂ©sentĂ©e par l'idĂ©e-image; et en effet il est certain que l'apparence visible, la figure des corps extĂ©rieurs placĂ©s devant nous, devant l'organe de la vision, se peint sur la rĂ©tine Cousin, Hist. philos. xviiies., t. 2, 1829, p. 359.PHILOS., PSYCHOL. Cette unitĂ© indissoluble du penser et de l'agir est la loi psychologique d'importance capitale que nous rĂ©sumons par le terme idĂ©e-force. Tout Ă©tat de conscience est idĂ©e en tant qu'enveloppant un discernement quelconque, et il est force en tant qu'enveloppant une prĂ©fĂ©rence quelconque; si bien que toute force psychique est, en derniĂšre analyse, un vouloir A. FouillĂ©e, La Psychol. des idĂ©es-forces, Paris, Alcan, tome 1, 1893, p. X. ÎČ Qualifie l'idĂ©e en prĂ©cisant sa fonction. ArrĂȘtons-nous donc au moins un moment, Ă  examiner ce qui rĂ©sulte de cette idĂ©e premiĂšre dont toutes les autres suivent, de cette idĂ©e-principe dont nous ne pouvons que tirer des consĂ©quences, de cette idĂ©e mĂšre dont nous ne faisons que recueillir les productions Destutt de Tr., IdĂ©ol. 3,1805, p. 497.L'idĂ©e-levier de ce charmant esprit? C'est de se faire installer une vĂ©randa Ă  Vernon Renard, Journal,1901, p. 644.Le cube Ă  six faces Ă©gales est l'idĂ©e-limite par laquelle j'exprime la prĂ©sence charnelle du cube qui est lĂ , sous mes yeux, sous mes mains, dans son Ă©vidence perceptive Merleau-Ponty, PhĂ©nomĂ©nol. perception,1945, p. 236.L'idĂ©e-clef de l'habitude, la rĂšgle eidĂ©tique qui commande toute enquĂȘte empirique, est que le vivant apprend » par le temps RicƓur, Philos. volontĂ©,1949, p. 264. adj. et subst.,domaine des a Adj. Dont le but est l'expression de l'idĂ©e ou des idĂ©es. En exprimant le programme de la nouvelle Ă©cole, dans un article cĂ©lĂšbre du Mercure de France, Albert Aurier ne faisait autre chose que rĂ©sumer Delacroix L'Ɠuvre d'art, disait-il Ă  son tour, sera idĂ©iste, puisque son idĂ©al unique sera l'expression de l'idĂ©e; symboliste puisqu'elle exprimera cette idĂ©e par des formes... » Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 269.b Subst. α Subst. fĂ©m. École de peinture d'aprĂšs laquelle l'Ɠuvre d'art est ou doit ĂȘtre l'expression de l'idĂ©e ou des idĂ©es. Ces deux ... esthĂ©tiques rivales, la naturaliste et l'idĂ©iste, l'une professant que l'extĂ©rioritĂ© des choses est, en elle-mĂȘme, intĂ©ressante et suffisante Ă  l'Ɠuvre d'art; l'autre, l'idĂ©iste, niant, au contraire, cela et ne voulant considĂ©rer les formes matĂ©rielles que comme les lettres d'un mystĂ©rieux alphabet naturel servant Ă  Ă©crire les idĂ©es, seules importantes, puisque l'art n'est qu'une matĂ©rialisation spontanĂ©e et harmonieuse des idĂ©es J. Huret, EnquĂȘte sur l'Ă©volution littĂ©raire,1891, p. 131 ds Quem. DDL t. 13. ÎČ Subst. masc. Peintre reprĂ©sentant cette Ă©cole. On annonce un nouveau Salon des Impressionnistes, ..., un des Symbolistes, et ... celui des IdĂ©istes Le Journ. amusant,9 janv. 1892ds Quem. DDL t. 17.Prononc. et Orth. [ide]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a 1119 idees formes des choses prĂ©sentes de toute Ă©ternitĂ© en Dieu » Ph. de Thaon, Comput, Ă©d. E. Mall, 1523; 1370-72 ydee archĂ©type commun constituant la notion gĂ©nĂ©rale d'une espĂšce; notion intellectuelle prĂ©existante d'un ĂȘtre ou d'un objet particulier » Oresme, Ethiques, Ă©d. A. D. Menut, p. 113; b 1458 ydees types, prĂ©existant dans notre intention, d'une action que nous ferons plus tard » A. Greban, MystĂšre de la Passion, Ă©d. O. Jodogne, 48; 1670 projet, dessein » MoliĂšre, Amants magnifiques, 2. a 1487 forme ou image » Vocabulaire latin-français, Loys Garbin, idea; b 1552 image d'un objet ou d'un ĂȘtre, telle que les sens la perçoivent » Ronsard, Les Amours, 13 ds ƒuvres, Ă©d. P. Laumonier, IV, p. 30; c 1564 image de quelque chose ou de quelqu'un, telle que l'esprit la conserve dans le souvenir et se la reprĂ©sente par l'imagination » Thierry; 3. a 1583 reprĂ©sentation, en tant qu'objet de pensĂ©e, d'un ĂȘtre ou d'une chose dans notre esprit, quelle que soit l'origine de cette reprĂ©sentation Ph. Desportes, ElĂ©gies, Ă©d. V. E. Graham, II, 5; b 1656 ensemble de pensĂ©es et de jugements appliquĂ© Ă  un ou plusieurs objets et constituant une opinion plus ou moins motivĂ©e » Pascal, Provinciales, XIV ds ƒuvres compl., Ă©d. L. Lafuma, p. 439b. B. a 1616 par idee de façon imaginaire » A. d'AubignĂ©, Tragiques, Ă©d. A. Garnier et J. Plattard, II, p. 86, 1178; b 1643 en idĂ©e id. » P. Corneille, La suite du Menteur, II, 1. Du lat. idea idĂ©e [de Platon], type de choses » en lat. tardif forme visible » d'oĂč 2, lui-mĂȘme empr. au gr. Îč ̓ ÎŽ Δ ́ α proprement forme visible, aspect » d'oĂč forme distinctive, espĂšce », qui se rattache Ă  Îč ̓ ÎŽ Δ Îč ̃ Μ comme le lat. species Ă  spectare, inf. aoriste2de Δ Îč ̃ ÎŽ Îż Μ voir »; pour l'hist. de ce mot v. FEW t. 4, pp. 532-535. FrĂ©q. abs. littĂ©r. 47 911. FrĂ©q. rel. littĂ©r. xixes. a 85 873, b 59 538; xxes. a 61 944, b 61 326. Bbg. Gohin 1903, p. 247, 336. - Meschonnic H.. Essai sur le ch. lex. du mot idĂ©e. Cah. Lexicol. 1964, t. 5, pp. 57-68. - Quem. DDL t. 9, 12, 13, 17. - Sckomm. 1933, pp. 53-60 - Zumthor P.. Pour une hist. du vocab. fr. des idĂ©es. Z. rom. Philol. 1956, t. 72, p. 350. Dansle monde, il existe des Ă©nigmes, et ceux qu’elles intriguent aimeraient en savoir plus long sur l’agencement, sur la trame de l’existence. Ces Ă©nigmes, en voici des Romancier, auteur touche-Ă -tout, propagandiste des idĂ©es libĂ©rales pour le grand public, Edmond About 1828-1885 jouit aujourd’hui d’une cĂ©lĂ©britĂ© en demi-teinte. Ses romans, lus surtout par un jeune public, sont frĂ©quemment rééditĂ©s ; mais la partie doctrinale de son Ɠuvre, faite de livres comme Le ProgrĂšs 1864 ou l’ABC du travailleur 1868, est tombĂ©e dans l’oubli, malgrĂ© la force des idĂ©es libĂ©rales qu’ils contiennent et leur style entraĂźnant. Dans l’étude qui suit, la contribution d’About au libĂ©ralisme français est Ă©tudiĂ©e pour la premiĂšre fois avec profondeur et sur la base de documents inĂ©dits. [Avertissement prĂ©alable sur son nom et ses origines] Il y a des clairiĂšres ou des forĂȘts oĂč vous n’avez pas risquĂ© un demi-pas qu’un Ă©criteau vous annonce un danger ; ne peut-on pas marcher en paix ? Cependant ici je dois moi-mĂȘme procĂ©der ainsi pour Ă©viter qu’on ne prononce Ă  la maniĂšre anglo-saxonne le nom de l’homme dont je vais parler, et pour toute raison je citerai la convenance, la douceur française, l’amĂ©nitĂ©, quoique j’aie derriĂšre moi aussi la force des faits car en vieux français about, habout, a signifiĂ© limite d’un champ, borne, ou encore hypothĂšque, en droite ligne du latin abbotum, abdoutamentum, et le nom a pu ĂȘtre donnĂ© Ă  un arpenteur ; ou alors il honorait un simple pĂȘcheur, en le dĂ©corant du nom donnĂ© Ă  un filet de pĂȘche que l’on plaçait au bout d’un Ă©tang ou d’une Ă©cluse pour retenir le poisson. Johannes Baumgarten, Glossaire des idiomes populaires du nord et du centre de la France, 1870, p. 62. Quoi qu’il en soit Edmond About Ă©tait d’origine modeste ; il ne l’ignorait pas, et en tirait mĂȘme une certaine fiertĂ©, rappelant par exemple dans une dĂ©dicace Ă  sa fille Valentine, en ouverture de l’un de ses romans, qu’ils n’ont ensemble pour ancĂȘtre que des pauvres, des humbles et des petits. » Le roman d’un brave homme, 1880, p. vi. Par la gaietĂ© de son tempĂ©rament et son Ă©criture lĂ©gĂšre, par son engagement pour la libertĂ© et ses convictions anti-clĂ©ricales, About a plus tard mĂ©ritĂ© le titre passablement flatteur de petit-fils de Voltaire. Lui-mĂȘme, dans sa modestie, n’ambitionnait pas d’ĂȘtre mis au rang de si brillants prĂ©dĂ©cesseurs. Je n’ai reçu de la nature », disait-il, qu’un atome de bon sens, une miette balayĂ©e sous la table oĂč Rabelais et Voltaire, les Français par excellence, ont pris leurs franches lippĂ©es. » Le ProgrĂšs, 1864, p. 3 Un gĂ©nĂ©alogiste dirait qu’il Ă©tait surtout l’enfant de son siĂšcle. [Premier tir dans son abondante littĂ©rature] Auteur d’une Ɠuvre immense, et ayant travaillĂ© tous les genres, Edmond About s’offre Ă  nous dans toute son abondance et sa dĂ©mesure. Il appelle, par cet excĂšs mĂȘme, Ă  une classification prĂ©alable. L’ironie veut que cet auteur infatigable ait d’abord formĂ© le vƓu de la concision. La veille de ses dix-huit ans c’était en fĂ©vrier 1846, il affirmait en effet devant l’un de ses amis du collĂšge Charlemagne une rĂ©solution ferme et passablement courageuse, dont il a pris plus tard le contre-pied. Si jamais j’écris », affirmait-il alors, je ne ferai pas comme tous ces gens stupides qui, incessamment, entassent volume sur volume ; je publierai peu, je soignerai beaucoup, je reviendrai Ă  la langue des seiziĂšme et dix-septiĂšme siĂšcle. » Journal de jeunesse de Francisque Sarcey, 1903, p. 15. Sa vie durant, About n’a rien soignĂ© ; sa verve naturelle l’emportait Ă  tous les diables, et il se laissait mener. L’étude de ses manuscrits l’indique d’ailleurs passablement son Ă©criture est claire, sans rature aucune, comme s’il composait sous la dictĂ©e d’un autoritĂ© supĂ©rieure, qui lui inspirĂąt ses phrases. Ayant choisi, de bonne heure, de n’avoir Ă  proprement aucune spĂ©cialitĂ©, il empruntait aux meilleurs maĂźtres et Ɠuvrait en propagateur ; il se comparait lui-mĂȘme au vagabond, dont le destin est de traĂźner sa destinĂ©e prĂ©caire sur le terrain de tout le monde, glanant aprĂšs les moissonneurs, hallebotant aprĂšs les vendangeurs, braconnant aprĂšs le plus spirituel et le plus aimable des chasseurs. » Causeries, vol. II, 1866, p. 221 TrĂšs fermement convaincu du sens du progrĂšs et de la supĂ©rioritĂ© de la libertĂ© sur le contrainte, il en propageait les arguments dans toutes les petites batailles de la presse, dans ses Ɠuvres littĂ©raires et dans ses Ă©crits plus sĂ©rieux. Au sein de l’armĂ©e du progrĂšs, il prenait ainsi tous les rĂŽles tantĂŽt Ă  l’avant-garde, tantĂŽt Ă  l’arriĂšre-garde, tirailleur, Ă©claireur, enfant perdu, clairon, toujours simple soldat et content de porter l’épaulette de laine, mais fermement rĂ©solu Ă  ne jamais me perdre dans la foule honteuse des traĂźnards » Idem, p. 245. Si la presse occupa une si grande place dans sa vie, c’est pour cette raison prĂ©cise que le journaliste n’élabore pas de lui-mĂȘme des idĂ©es, mais les colporte dans le monde ; qu’il fournit ainsi une nourriture facile et aisĂ©ment ingurgitable ; enfin qu’il effleure chaque sujet et Ă©claire un peu le chemin que le lecteur accomplira seul ou guidĂ© par d’autres Idem,p. 340, 89, 260. Le dĂ©chaĂźnement des passions dans la presse quotidienne le mĂ©contentait sans le dĂ©goĂ»ter, car il gardait une vue claire de l’avenir, et il ne doutait pas que la postĂ©ritĂ©, dĂ©gagĂ©e des querelles et des scandales, montrerait de la reconnaissance pour les vrais artisans du progrĂšs, et que pareille Ă  la divinitĂ© elle aurait le jugement sĂ»r et reconnaĂźtrait les siens. Cette vision sereine de l’avenir tranchait, naturellement, avec le combat quotidien des journaux et l’animositĂ© rĂ©currente de la critique et du public, envers nombreuses de ses productions. L’échec terrible de sa piĂšce GaĂ«tana est restĂ© cĂ©lĂšbre dans l’histoire, et lui-mĂȘme joua de cette dĂ©faveur monumentale, aprĂšs avoir ruminĂ© patiemment sa colĂšre il ajouta des notes Ă  son texte, pour indiquer les moments oĂč le public avait commencĂ© Ă  siffler, ou ceux pendant lesquels il avait fait savoir qu’il savait imiter les cris des animaux les plus divers ». GaĂ«tana, drame en cinq actes, 5eĂ©dition, 1862, p. 76. C’était, pour un homme du siĂšcle, si intĂ©grĂ© dans le dĂ©bat des idĂ©es, la consĂ©quence naturelle de son engagement, et About savait rendre les coups. Dans sa longue carriĂšre de critique d’art, par exemple, il a multipliĂ© les morsures, et disposant d’un vocabulaire trĂšs souple il a laissĂ© quelques saillies mĂ©morables, comme cette accusation de crime de lĂšse-dessin » Ă  l’encontre de Mme Doux et de son Portrait de femme. Nos artistes au salon de 1857, 1858, p. 206. La liste de ses piĂšces de théùtres, nouvelles et romans, est dĂ©routante, et ses articles de journaux sont proprement innombrables. La contribution Ă  la pensĂ©e libĂ©rale française Ă©tant le seul point de vue par lequel j’aie Ă  considĂ©rer About, une vaste partie de son Ɠuvre n’a pas vocation Ă  ĂȘtre Ă©tudiĂ©e ici. Cependant un grand nombre de ses romans reprennent en arriĂšre-plan des questions d’administration ou d’économie politique, deux domaines qui le passionnaient. L’agriculture et le dĂ©frichement, l’industrie et ses mĂ©tiers, forment le fond du Fellah 1869, du Roman d’un brave homme 1880, de MaĂźtre Pierre 1862, de Madelon 1863 ou de l’InfĂąme 1867. Des considĂ©rations sur l’agriculture, les effets d’une fiscalitĂ© Ă©crasante, etc., se retrouvent aussi dans certains livres sĂ©rieux, consacrĂ©s Ă  des questions d’actualitĂ©, Ă©trangĂšres au libĂ©ralisme Ă  proprement parler, comme La question romaine 1859. Je ferai une exception pour sa GrĂšce contemporaine 1854, car ce livre a connu un rebond de cĂ©lĂ©britĂ© il y a quelques annĂ©es, Ă  l’occasion des dĂ©boires financiers de l’État grec. Quant aux autres prĂ©occupations d’About associĂ©es Ă  la libertĂ©, et qui se trouvent exposĂ©es dans ses romans — voir par exemple la Fille du chanoine, premiĂšre nouvelle du recueil les Mariages de province 1868, dans lequel About dĂ©crit les dĂ©boires causĂ©s par l’oppression parentale dans la question du mariage — je ne retiendrai que celles qu’il a exposĂ©es patiemment dans ses quelques ouvrages de doctrine. Car en marge, d’un cĂŽtĂ©, de son engagement quotidien dans la presse, et de l’autre de son Ɠuvre lĂ©gĂšre et mĂȘme parfois frivole de romancier ou d’homme de théùtre, About a Ă©crit plusieurs livres et brochures consacrĂ©es directement aux grandes questions politiques, Ă©conomiques et sociales. Il y eut mĂȘme dans sa carriĂšre une dĂ©cennie spĂ©ciale durant laquelle il abandonna la littĂ©rature pour traiter, avec son style lĂ©ger et entraĂźnant, des grands thĂšmes habituellement couverts par les Ă©conomistes libĂ©raux tels que FrĂ©dĂ©ric Bastiat, Michel Chevalier ou Gustave de Molinari. C’est George Sand, semble-t-il, qui le poussa surtout Ă  s’engager dans cette voie. Vous ĂȘtes un grand satirique et un grand avocat », lui Ă©crivit-elle en mai 1863 ; vous n’ĂȘtes pas fait pour amuser seulement. Vous ĂȘtes fait pour redresser et pour instruire. » Correspondance de Georges Sand, vol. XVII, 1964, p. 633. Avant mĂȘme cette proposition, on peut citer d’About, dans le genre sĂ©rieux et libĂ©ral ici considĂ©rĂ©, sa courte lettre sur la libertĂ© de l’enseignement, publiĂ©e en 1860. L’un de ses confrĂšres imprimait alors un projet de rĂ©forme aboutissant Ă  confier Ă  l’État l’éducation nationale About repoussa ce projet, le qualifiant de vĂ©ritable dictature », et il se prononça pour la libertĂ© absolue » de l’enseignement. ConsidĂ©rations sur la libertĂ© d’enseignement par Marie-Henry de La Garde, suivies d’une lettre adressĂ©e Ă  l’auteur par Edmond About, 1860, p. 46-47. En 1864 parut Le ProgrĂšs, qui est peut-ĂȘtre le chef-d’Ɠuvre d’About, et son ouvrage de doctrine le plus fĂ©cond et le plus abouti. Me proposant d’analyser plus loin les idĂ©es libĂ©rales d’About, je ne ferai ici que mentionner son succĂšs remarquable, et ses rééditions en 1864, 1865, et 1867. La popularitĂ© et le succĂšs n’étant par dĂ©finition pas communs, je joindrai dans cette analyse bibliographique la liste des rééditions des textes libĂ©raux d’About, car peu d’auteurs, mis Ă  part peut-ĂȘtre Jules Simon, ou Tocqueville mort en 1859, rencontrĂšrent Ă  cette Ă©poque une si large diffusion. En 1865, About publia encore une petite brochure, reproduite plus tard dans la deuxiĂšme sĂ©rie des Causeries elle est consacrĂ©e Ă  la libertĂ© du travail des femmes. Il avait saisi l’occasion du rejet des femmes de l’industrie typographique, rejet qu’il qualifie de prĂ©tention injuste, illibĂ©rale, illogique au premier chef » La justice, etc., 1865, p. 7 ; Causeries, vol. II, 1866, p. 298, pour faire le procĂšs des inĂ©galitĂ©s lĂ©gales, existantes ou projetĂ©es, entre les hommes et les femmes. Son argument majeur Ă©tait qu’il n’y a pas deux logiques, l’une pour les hommes, l’autre pour les femmes, et que la libertĂ© du travail vaut pour tout le monde. La justice, etc., 1865, p. 22 ; Causeries, vol. II, 1866, p. 318 Aussi disait-il aux hommes qui cherchaient Ă  exclure du marchĂ© leurs concurrentes fĂ©minines et Ă  les renvoyer dans leur foyer, oĂč elles gagneraient leur pain comme elles pourraient Tout ĂȘtre intelligent choisit librement un travail, selon ses goĂ»ts et ses aptitudes. Vous trouveriez injuste et rĂ©voltant que l’on vous contraignĂźt Ă  casser des pierres sur les routes. Homme ou femme, chacun peut vivre comme il lui plaĂźt, pourvu qu’il ne nuise Ă  personne. » La justice, etc., 1865, p. 17 ; Causeries, vol. II, 1866, p. 312 Mais je reviendrai plus tard sur la dĂ©fense de la cause fĂ©minine par Edmond About. Dans le domaine de l’économie politique, il a encore consacrĂ© un livre pour prouver aux masses l’utilitĂ© des assurances sur les biens et sur les personnes Les questions d’argent. L’Assurance, 1865, rééditĂ© en 1866 et 1874 et une petite brochure sur le thĂšme plus prĂ©cis encore de l’épargne populaire et de l’assurance sur la vie Le capital pour tous. Plus de prolĂ©taires, 38 millions de bourgeois, 1868. Mais c’est surtout son A B C du travailleur 1868 qui nous arrĂȘtera. Cette Ɠuvre gĂ©nĂ©raliste qui connut un vrai succĂšs, et qui sera rééditĂ©e quatre fois 1869, 1879, 1882, 1888, Ă©tait conçue comme un traitĂ© d’économie Ă  l’usage des masses. Le CatĂ©chisme d’économie politique de Jean-Baptiste Say Ă©tant jugĂ© trop austĂšre et trop abstrait, About en livra sa propre version, en lui donnant aussi un titre laĂŻcisĂ©. C’était, sur le terrain des questions proprement Ă©conomiques, la continuation de son Ɠuvre de propagandiste. [Nature de sa contribution au libĂ©ralisme] Les Ă©crits d’About sont remplis de passages succulents, de bons mots, de comparaisons habiles, propres Ă  toucher les masses. Les contemporains qui l’ont cĂŽtoyĂ© racontent que lorsqu’un trait saillant traversait son esprit, il ne pouvait s’empĂȘcher ou de le dire ou de l’écrire, et que dans les rĂ©unions privĂ©es qu’il Ă©gayait de son esprit, sa femme mĂȘme ne pouvait le retenir, et gĂ©missait impuissante en disant Edmond ! » Marcel ThiĂ©baut, Edmond About, 1936, p. 129-130. Son humeur mordante, son esprit sans cesse railleur, le font distinguer de Bastiat, auquel il ressemble tant par ailleurs, mais dont la verve Ă©tait propre, presque douce, comme son caractĂšre. About au contraire, qui sait manier l’humour, ne manque pas non plus de la capacitĂ© d’écraser son adversaire sous une plaisanterie confondante. Sa contribution au libĂ©ralisme français se rapproche, par l’intention, de celle de FrĂ©dĂ©ric Bastiat mais About n’a pas de prĂ©tention scientifique, et s’il Ă©tudie les faits et les statistiques, ce n’est pas pour en faire usage, mais pour observer ou vĂ©rifier des tendances. L’économie politique, il la saisit comme un Ă©colier, et ne songe pas Ă  la rĂ©former. Ce qu’il accomplit, ou du moins ce qu’il ambitionne, c’est de passer les vĂ©ritĂ©s de la science dans le fond commun du savoir, c’est d’enseigner les principes de la libertĂ© aux prolĂ©taires, par exemple, en publiant des livres attrayants, des brochures Ă  bon marchĂ©, qui parlent leur langue et soient dĂ©cidĂ©ment destinĂ©s Ă  les instruire. Edmond About dispose pour cela du tempĂ©rament et des compĂ©tences techniques nĂ©cessaires. SĂ©duit, vers 1848, par les idĂ©es socialistes, desquelles il est revenu, il connaĂźt la force des prĂ©jugĂ©s populaires et ne mĂ©dit pas du pauvre ouvrier qui dĂ©raisonne. Lui aussi, Ă©tant lycĂ©en, s’imaginait que la communautĂ© des hommes devait se faire dans le partage des richesses de ce monde, que la terre Ă©tait Ă  tous, ou que l’argent Ă©tait sale, et la richesse une flĂ©trissure A B C du travailleur, 1868, p. 11, 180. About sait en outre parler le langage des masses, en assaisonnant ses considĂ©rations thĂ©oriques de comparaisons et d’historiettes. [Appui donnĂ© par l’étude de ses papiers inĂ©dits] Mais avant d’en venir aux principes qu’il a dĂ©fendus dans ses Ă©crits en renouvelant leur prĂ©sentation et leur argumentation, il me faut indiquer une ressource supplĂ©mentaire Ă  la comprĂ©hension de sa pensĂ©e vraie. Son livre du ProgrĂšs rassemble, je l’ai dit, ses conceptions libĂ©rales et les expose d’une maniĂšre didactique et assez complĂšte. Mais l’examen des papiers d’About indique que ce texte n’était qu’une version adoucie, censurĂ©e, d’un premier travail plus audacieux. DĂ©jĂ  Ludovic HalĂ©vy avait notĂ© dans ses carnets, en dĂ©cembre 1863, que le futur livre d’About serait sensiblement remaniĂ© par l’éditeur, Louis Hachette. About est Ă  Paris » marque-t-il. Il Ă©tait hier soir Ă  l’OpĂ©ra. Il a terminĂ© un ouvrage politique et philosophique, le ProgrĂšs. Ouvrage absolument impie, dit-il, et qui distancera la Vie de JĂ©sus[d’Ernest Renan 1863]. L’athĂ©isme est indiquĂ© comme la base nĂ©cessaire des sociĂ©tĂ©s futures. Quant Ă  JĂ©sus-Christ, Aboutl’appelait Un IsraĂ©litedistinguĂ© dont M. Renan a fait un portrait trop flattĂ©. Mais le prudent Hachette a reculĂ© devant cette phrase originale About a dĂ» la supprimer. » Carnets, 1862-1869, 1935, p. 28 Aujourd’hui nous n’avons pas la trace du premier Ă©tat du texte ; mais les archives personnelles d’Edmond About, conservĂ©es Ă  l’Institut Ms. 3984, nous donnent Ă  lire un autre document important, Ă  savoir les placards corrigĂ©s, oĂč Hachette a portĂ© des commentaires, barrĂ© des passages, demandĂ© des adoucissements, sur une version du texte qui Ă©tait dĂ©jĂ  amendĂ©e. En comparant les placards avec le texte imprimĂ©, il est clair que le message d’Edmond About a Ă©tĂ© adouci. À titre d’exemple, l’esprit le plus faux et le plus arrogant du dix-septiĂšme siĂšcle, l’évĂȘque Bossuet », devient l’immortel Bossuet » dans le texte imprimĂ©. De mĂȘme, un passage qui critique l’administration aprĂšs l’accident sur le chemin de fer des dunes de l’Ouest, entre Carnac et Quiberon, se trouve tout Ă  coup transportĂ© en Chine, entre Ning-Po et Ky-Tcheou, pour ne pas heurter les sensibilitĂ©s. Non seulement About a dĂ» faire des concessions dans le style, pour Ă©viter les attaques trop violentes contre la religion notamment, mais il a transformĂ© aussi Ă  certains endroits sa pensĂ©e, quand elle Ă©tait jugĂ©e trop audacieuse. J’en donnerai ici un exemple frappant. Le dixiĂšme chapitre du placard, intitulĂ© Le droit et l’association » — et qui est devenu le cinquiĂšme dans l’imprimĂ©, sous le titre Le droit » —, se prĂ©sente comme un grand exposĂ© sur les droits individuels. Une modification de quelques mots, entre le placard et l’ouvrage imprimĂ©, a produit dans cette discussion une altĂ©ration majeure. Dans la version originale, plus ou moins remaniĂ©e dĂ©jĂ , qu’on lit dans le placard, le chapitre s’ouvre par ces mots Qui que tu sois, lecteur, mĂąle ou femelle, fort ou faible, savant ou ignorant, noble ou roturier, Bourbon ou Durand, je te dĂ©clare, au risque d’étonner ta sottise et d’épouvanter ta couardise, que tu n’as ni maĂźtre, ni chef, ni supĂ©rieur naturel, et que ta personne et tes biens ne relĂšvent que de toi. » BibliothĂšque de l’Institut, Ms. 3984 Or l’imprimĂ© fait une brĂšve modification, trĂšs lourde de sens, et on lit dĂ©sormais Homme grand ou petit, riche ou pauvre, fort ou faible, savant ou ignorant, noble ou roturier, Bourbon ou Durand, je te dĂ©clare, au risque d’étonner ta sottise et d’épouvanter ta couardise, que tu n’as ni maĂźtre, ni chef, ni supĂ©rieur naturel, et que ta personne et tes biens ne relĂšvent que de toi. » Le ProgrĂšs, 1864, p. 59 Toute la puissance de la pensĂ©e d’About sur le droit Ă©gal des femmes Ă  la libertĂ© individuelle et Ă  l’auto-dĂ©termination est perdu. Certes, on peut encore lire dans le chapitre imprimĂ© quelques affirmations courageuses, mais dĂ©sormais vagues et sans force, comme celle qui professe qu’ il n’y a point de degrĂ©s dans la dignitĂ© humaine » Le ProgrĂšs, 1864, p. 59, mais l’agencement original du chapitre et la formulation trĂšs claire de son ouverture rendait davantage compte des intentions prĂ©cises de l’auteur. L’étude de ce document permet du moins cette observation prĂ©cieuse, qu’au sein d’une gĂ©nĂ©ration de libĂ©raux dont la conversion aux principes du fĂ©minisme libĂ©ral Ă©tait encore Ă  faire, Edmond About a cherchĂ© avec fermetĂ© Ă  placer la libertĂ© individuelle des femmes sur le plan de l’égalitĂ©. En consultant ses romans ou ses autres ouvrages sĂ©rieux ou rĂ©putĂ©s tels, cette connotation n’est certes pas une surprise. On sait qu’il disait de la question des femmes, que c’était un sujet sur lequel on ne saurait trop s’étendre » Causeries, vol. II, 1866, p. 14 Et non content d’avoir livrĂ© bataille pour leur garantir l’accĂšs libre aux diffĂ©rents mĂ©tiers — et non seulement aux activitĂ©s du foyer, ou aux professions dites fĂ©minines — About avait aussi condamnĂ© la pauvretĂ© de l’éducation morale et intellectuelle apportĂ©e aux jeunes filles. Toute une moitiĂ© de la nation, le sexe fĂ©minin », Ă©crivait-il, appartient Ă  la catĂ©gorie des non-valeurs relatives. AssurĂ©ment, la nature n’a rien fait de meilleur ni de plus intelligent que la femme ; elle est propre Ă  tous les travaux de l’esprit ; elle est capable de tous les actes de dĂ©vouement et d’hĂ©roĂŻsme. Elle est plus courageuse que l’homme et sans cela, la terre serait dĂ©peuplĂ©e depuis longtemps ; elle est plus sobre ; elle a toujours plus de finesse et souvent plus d’élĂ©vation dans les idĂ©es. Elle aborde avec succĂšs le commerce, l’industrie, l’art, les lettres, les sciences, la politique mĂȘme, lorsqu’un heureux hasard la met hors de page et Ă©mancipe ses talents. Mais l’homme, qui s’applique si bravement Ă  perfectionner ses bƓufs, ses chevaux et ses chiens ; l’homme qui a su dresser les Ă©lĂ©phants Ă  danser la polka, les barbets Ă  faire l’exercice et les petits oiseaux Ă  dire la bonne aventure, met presque autant de zĂšle Ă  rabaisser sa compagne et son Ă©gale par la plus odieuse et la plus sotte Ă©ducation. J’ai lu je ne sais oĂč, mais assurĂ©ment dans des livres Ă©crits en style noble, que le christianisme et la chevalerie avaient mis la femme sur le trĂŽne comment se fait-il donc qu’elle soit encore gouvernĂ©e comme une ilote en jupons ? Pourquoi l’instruction qu’on lui donne est-elle entiĂšrement tournĂ©e Ă  l’ignorance ou Ă  la niaiserie ? Dans quel intĂ©rĂȘt traitons-nous son cerveau comme le mandarin traite les pieds de sa chinoise ? Pourquoi poursuivons-nous d’une sorte de rĂ©probation toute femme qui cultive un autre art que la musique ? Pourquoi le travail est-il organisĂ© de telle façon qu’une femme ne puisse honnĂȘtement gagner sa vie ? Pourquoi les industries fĂ©minines par excellence sont-elles envahies par MM. les lingers, corsetiers et couturiers, tandis qu’une femme est gĂ©nĂ©ralement reçue Ă  coups de fourche lorsqu’elle se prĂ©sente comme compositeur dans une imprimerie ? » Le ProgrĂšs, 1865, p. 129-130. Ailleurs, il demandait s’il Ă©tait si prĂ©cieux et utile de bander les yeux des jeunes filles sur les pratiques de la vie maritale, et si un savoir honnĂȘte aurait Ă©tĂ© vraiment un vain bagage Causeries, vol. II, 1866, p. 22. [Les principes du libĂ©ralisme popularisĂ©s par About] About a poursuivi sa carriĂšre de propagandiste des idĂ©es libĂ©rales avec l’ambition premiĂšre d’ĂȘtre clair, instructif et convaincant. Il Ă©crivait pour les masses, et cela impliquait d’adapter l’exposition et l’expression des idĂ©es au lecteur, fĂ»t-il un simple paysan, un manouvrier ou un domestique. La gloire des grandes productions de l’esprit, About la laissait Ă  ses amis, collĂšgues, et frĂ©quentations, Michel Chevalier, Édouard de Laboulaye ou Hippolyte Taine. Sa tĂąche Ă  lui Ă©tait plus sommaire. La plupart des savants Ă©crivent pour se faire admirer », notait-il une fois ; je ne suis qu’un ignorant de bonne volontĂ©, et je n’ai d’autre ambition que d’ĂȘtre compris. » L’Assurance, 1865, p. 23 MĂȘme renfermĂ© dans ces bornes modestes, About frappait par son enthousiasme et son ardeur communicative. D’un coup d’Ɠil, il saisissait la grande valeur d’une question d’économie politique, et l’exposait sans broncher en termes simples Ă  un public enragĂ© par les prĂ©jugĂ©s contraires. Pour ceux qui, Ă  ses cĂŽtĂ©s, ne partageaient pas son goĂ»t pour les questions Ă©conomiques, il paraissait un illuminĂ©, touchĂ© par la grĂące. Qu’il s’agit du libre-Ă©change ou des sociĂ©tĂ©s de coopĂ©ration », dit Joseph Reinach, de la question monĂ©taire ou des grĂšves, des non-valeurs de la terre ou de l’assurance, des transports ou de la mutualitĂ©, ils’assimilait les principes gĂ©nĂ©raux avec une prodigieuse facilitĂ© et il en parlait avec une telle abondance d’arguments et de renseignements, avec une telle prĂ©cision et une telle sĂ»retĂ©, qu’on eĂ»t jurĂ© qu’il ne s’était jamais occupĂ© d’autre chose. » Le dix-neuviĂšme siĂšcle, 1892, prĂ©face, p. xxxv Cette terre d’adoption n’était pas, on le sait, sa spĂ©cialitĂ©, car Ă  vrai dire About n’en eut jamais aucune ; aussi on n’espĂšre pas qu’il fĂ»t, dans la dĂ©fense des idĂ©es libĂ©rales, aussi neuf et brillant que les grands maĂźtres Ă  penser qui lui donnĂšrent la matiĂšre de ses ouvrages. Son mĂ©rite est Ă  trouver ailleurs. Écrivant pour les ouvriers, il leur parle un langage de sagesse, et donne le change aux Ă©crivains socialistes qui enveniment les dĂ©bats. About, lui, n’offre ni sĂ©duction factice ni promesse illusoire. Aux ouvriers qui rĂ©pĂštent les mots qui les ont flattĂ©, et se disent des dĂ©shĂ©ritĂ©s, il rĂ©pond que non rien n’est plus faux. DĂ©shĂ©ritĂ©s par qui ? DĂ©shĂ©ritĂ©s de quoi ? Leurs pĂšres n’ont rien laissĂ© pour eux. Ont-ils la prĂ©tention d’hĂ©riter d’un inconnu, au dĂ©triment des successeurs lĂ©gitimes ? » A B C du travailleur, 1868, p. 261. De mĂȘme, About Ă©crit que c’est presque toujours par une mĂ©prise que l’ouvrier se croit volĂ© par le capital ou le capitaliste il s’exagĂšre la valeur de son travail et dĂ©prĂ©cie le travail de son collaborateur, ce travailleur massif en fonte, qui a pour nom capital. A B C du travailleur, 1868, p. 266 Par ricochet les profits et ce que l’économie marxiste nommait la plus-value sont de toute justice, et aucune expression n’est plus vide de sens que celle qui parle d’exploitation de l’homme par le capital. Les agitateurs socialistes, dont les pĂ©roraisons raisonnent dans les usines, se trompent donc sur les motifs ; et l’on s’aperçoit rapidement que leurs conclusions ne valent guĂšre mieux. Redistribuer les revenus serait une pratique honteuse et illĂ©gale, dit About, car l’État a pour mission de protĂ©ger les propriĂ©tĂ©s, non de les violer. Le capital pour tous, 1868, p. 4 DĂ©cerner des droits nouveaux par excĂšs de philanthropie irait de mĂȘme Ă  contre-sens du progrĂšs. Le droit Ă  l’éducation, notamment, est une prĂ©tention abusive, qui renverse les droits et corrompt le principe de la propriĂ©tĂ©. Le ProgrĂšs, 1864, p. 70 Et si les ressources de l’association sont estimables, ce n’est pas, dit-il, dans de grandes sociĂ©tĂ©s coopĂ©ratives de consommation qu’il faut placer ses espoirs, l’essai ayant donnĂ©, en Angleterre, des rĂ©sultats piteux, hĂ©las conformes aux principes. A B C du travailleur, 1868, p. 283 De mĂȘme, la grĂšve a pour vice rĂ©dhibitoire de nuire Ă©galement aux deux parties et de produire des privations et des ruines, quand il serait plus sensĂ© de s’entendre d’emblĂ©e. Causeries, vol. II, 1866, p. 143 Quelle solution reste-t-il, alors ? Il reste pour l’ouvrier pauvre la ressource d’une organisation sociale et Ă©conomique qui facilitera son Ă©lĂ©vation, c’est-Ă -dire la libertĂ© de produire et d’épargner paisiblement. A B C du travailleur, 1868, p. 156 Il lui reste aussi Ă  comprendre que les intĂ©rĂȘts du capital et du travail sont harmoniques, et qu’au lieu de maugrĂ©er contre la fortune d’autrui, il vaut mieux qu’il souhaite Ă  son prochain l’opulence et la fortune, et cela dans son propre intĂ©rĂȘt. Idem, p. 138-139 et p. 140 Dans une dĂ©marche d’honnĂȘtetĂ© intellectuelle, et avec un vrai sens de l’intĂ©rĂȘt des travailleurs, About expose aussi les grands principes de l’économie libre, par lesquels chacun consomme, travaille ou Ă©change, portĂ© par le courant continuel du progrĂšs. Dans l’A B C du travailleur, notamment, il revient sur le motif structurant de l’intĂ©rĂȘt personnel, qui est Ă  la base de l’échange et des autres faits Ă©conomiques. Tous les producteurs produisent en vertu du mĂȘme principe » explique-t-il, qui est l’intĂ©rĂȘt personnel bien compris. Le boulanger ne pĂ©trit pas le pain pour nourrir les autres hommes, mais pour gagner son pain lui-mĂȘme et manger Ă  son appĂ©tit. Le maçon ne bĂątit pas pour loger le prochain, mais pour payer son terme. » A B C du travailleur, 1868, p. 63-64 Et si chacun obtient par son travail spĂ©cial les moyens de mener sa vie et de la soutenir, c’est que l’échange leur permet d’obtenir ce qu’ils dĂ©sirent. Ce mĂ©canisme de l’échange, central dans l’économie des sociĂ©tĂ©s, About en fait un vibrant Ă©loge, et il dit Ă  ses modestes lecteurs que si les hommes raisonnaient un peu, ils seraient tous en admiration et en reconnaissance devant le mĂ©canisme bienfaisant de l’échange. Il nous permet d’obtenir tous les biens qui nous manquent, tous les services que nous ne pourrions nous rendre Ă  nous-mĂȘmes. Et Ă  quel prix ? Moyennant un travail utile, n’importe lequel, qui est toujours laissĂ© Ă  notre choix. » Idem, p. 121-122 Le mĂ©rite du fonctionnement libre du marchĂ© se prĂ©sente aussi par contraste, lorsque l’on considĂšre les opĂ©rations auxquelles donne lieu l’intervention de l’État dans l’économie primes, subventions, services publics. On se demande par quelle notion de la justice les amateurs de spectacles, du théùtre et de l’opĂ©ra, par exemple, voient leur places subventionnĂ©es par ceux qui prĂ©fĂšrent passer leur soirĂ©e au cafĂ©, oĂč aucun concitoyen ne paie leur addition. Le ProgrĂšs, 1864, p. 319 C’est pourtant ce qui survient dans toute opĂ©ration qui dĂ©pend du domaine administratif, rappelle About l’homme qui reste chez lui paie l’entretien des routes impĂ©riales, et celui qui ne va pas Ă  la messe n’en contribue pas moins Ă  la rĂ©paration des Ă©glises. Idem, p. 235 À l’inverse, le marchĂ© — ou l’association libre », comme dit About — coordonne directement les besoins individuels et Ă©tablit leur balance dans la justice et la proportionnalitĂ©. Ainsi, en achetant un billet l’utilisateur d’une ligne de chemin de fer pait le prix du service qu’on lui rend, et celui qui ne voyage pas conserve son argent pour assouvir ses propres besoins. Idem, p. 235 Le mĂ©canisme de l’échange a encore pour vertu d’harmoniser les intĂ©rĂȘts et d’introduire un Ă©lĂ©ment structurant de solidaritĂ© entre les peuples des diffĂ©rentes nations. Dans l’A B C du travailleur, About revient sur cette prĂ©tention courante chez les masses, de ne guĂšre se prĂ©occuper ou s’émouvoir des malheurs Ă©conomiques ou sociaux survenus dans une autre partie du monde, et que les journaux français leur rapportent. Que m’importe le cholĂ©ra, s’il est aux Indes ? » tel est le langage du commun. Qu’ai-je Ă  craindre de la guerre civile, si elle se dĂ©bat entre AmĂ©ricains ? Les TaĂŻpings ont Ă©gorgĂ© toute la population d’une province, mais je m’en moque bien c’est en Chine ! » A B C du travailleur, 1868, p. 129 Pour lutter contre cette erreur Ă©conomique, About explique comment la destruction d’un bien, l’incendie d’un quartier, le saccage d’une rĂ©colte, produisent par ricochet les plus terribles consĂ©quences jusqu’à l’autre bout de la planĂšte. Car les hommes et les femmes du monde entier sont les clients et les fournisseurs les uns des autres ; et celui qui s’est ruinĂ© n’achĂšte plus et ne vend plus. Aussi, la conclusion est celle d’un humanisme Ă  l’échelle du monde, credo qu’About a plusieurs fois rĂ©pĂ©tĂ© dans ses Ɠuvres dans L’Assurance, il parle de ces hommes blancs, jaunes, rouges et noirs, tous solidaires les uns des autres comme les doigts de la mĂȘme main » L’Assurance, 1865, p. 29, et dans l’A B C du travailleur, oĂč cette idĂ©e apparaĂźt dans tout son dĂ©veloppement, il donne encore cette mĂȘme leçon, que ni les distances qui nous sĂ©parent, ni les diversitĂ©s d’origine, de couleur et de civilisation qui nous distinguent, ni mĂȘme les malentendus qui nous arment parfois les uns contre les autres n’empĂȘchent l’humanitĂ© de former un grand corps. » A B C du travailleur, 1868, p. 130. Le mĂ©canisme de l’échange pourvoyant avec justice aux besoins Ă©conomiques des populations, le rĂŽle de l’État apparaĂźt Ă  About comme devant ĂȘtre essentiellement nĂ©gatif il s’agit uniquement de protĂ©ger les individus des ennemis du dehors et des malfaiteurs du dedans. A B C du travailleur, 1868, p. 166. À ce titre, l’État peut ĂȘtre comparĂ© Ă  une grande sociĂ©tĂ© d’assurances mutuelles. Le capital pour tous, 1868, p. 3 Toute intervention positive, contrevenant aux motifs des Ă©changes libres, amĂšnerait des dĂ©ceptions. D’abord les rĂ©sultats ne seraient pas Ă  l’auteur des ambitions, comme pour la fixation des salaires, oĂč l’intervention de l’autoritĂ© force les entrepreneurs Ă  se passer des ouvriers dont le tarif excĂšde la vraie valeur. A B C du travailleur, 1868, p. 268. Ensuite, l’opĂ©ration, mĂȘme vaine, aurait encore eu pour mĂ©fait de violer la libertĂ© individuelle, qui est chose prĂ©cieuse. Elle l’était, du moins, suffisamment pour About, pour qu’il combatte chaque fois pour elle, et pour qu’il cherche Ă  convaincre ses concitoyens de sa valeur suprĂȘme. Quant Ă  ceux qui se promettaient une existence plus douce dans les fers de l’étatisme ou du collectivisme, il les laissait se dĂ©battre dans leur folie, et se contentait de les avertir Bonnes gens, vous ĂȘtes libres d’abdiquer tous vos droits, puisque vous y trouverez quelque mĂ©rite ; mais n’abdiquez pas les miens, par un excĂšs de zĂšle ! Si le besoin d’obĂ©ir vous tourmente si fort, entrez dans une de ces associations particuliĂšres oĂč l’on fait vƓu d’obĂ©issance j’en serai quitte pour ne pas m’enfroquer avec vous. » Le ProgrĂšs, 1864, p. 214 Quoiqu’il ait toujours affichĂ© une prĂ©fĂ©rence marquĂ©e pour les questions relevant de l’économie politique — dans le sens assez Ă©tendu qu’avait alors ce terme —, Edmond About a aussi dĂ©fendu la libertĂ© et les solutions libres dans des aspects les plus divers. Il n’est pas jusqu’aux questions de dĂ©forestation et de survie de la faune, qui ne l’aient vu proposer des solutions conformes Ă  l’initiative individuelle. Il voulait qu’avec quelques prĂ©cautions de rigueur toutes les forĂȘts de l’État et des communes soient vendues et exploitĂ©es enfin fructueusement par des individus ou des associations privĂ©es. Le ProgrĂšs, 1864, p. 123 De mĂȘme, il fournit des explications sur les moyens qu’emploie en Allemagne l’initiative individuelle, et qu’elle emploierait de mĂȘme en France si on n’y mettait des bornes, pour repeupler les Ă©tangs et les forĂȘts des espĂšces animales que la gestion laxiste et maladroite des autoritĂ©s voit diminuer et parfois disparaĂźtre Idem, p. 93-94. Dans le domaine de la politique, il a dĂ©fendu avec beaucoup de ferveur l’autonomie locale et il appelait ses compatriotes Ă  dĂ©centraliser, mot qui Ă©tait encore un barbarisme, et qu’il a participĂ© Ă  imposer, une quinzaine d’annĂ©es avant son entrĂ©e dans le dictionnaire de l’AcadĂ©mie. Le ProgrĂšs, 1864, p. 232 Converti, avec quelques rĂ©ticences, Ă  la dĂ©mocratie complĂšte et au suffrage universel, il entrevoyait des pĂ©rils possibles dans la tendance des candidats Ă  flatter ce qu’il appelait les illusions plĂ©bĂ©iennes ». A B C du travailleur, 1868, p. 278 Dans un article de son journal Le dix-neuviĂšme siĂšcle, il arguait mĂȘme que les codes, qui sont comme les bases de la sociĂ©tĂ© et de la civilisation, devraient ĂȘtre Ă  l’abri des actions lĂ©gislatives. Le Dix-neuviĂšme siĂšcle, 2 septembre 1872 ; Ă©d. Reinach, 1892, p. 22. [La question de la religion] La plupart de ces idĂ©es et propositions libĂ©rales sont en phase avec l’orthodoxie des autres grands penseurs du siĂšcle. L’une des dimensions de l’Ɠuvre d’Edmond About, au contraire, a donnĂ© lieu Ă  des divisons trĂšs fortes parmi les diffĂ©rents reprĂ©sentants du libĂ©ralisme français, et mĂ©rite donc un traitement Ă  part il s’agit de la religion. Edmond About a participĂ© au front anti-clĂ©rical, anti-religieux, prĂ©sent dans le libĂ©ralisme français, menant sa vie durant un combat Ăąpre et remarquĂ© contre toutes les croyances mystiques. À l’instar de Voltaire, de Bayle ou plus tard d’Yves Guyot, il se rattachait Ă  l’école des libre penseurs, ces esprits positifs, rebelles Ă  toutes les sĂ©ductions de l’hypothĂšse, rĂ©solus Ă  ne tenir compte que des faits dĂ©montrĂ©s. » Nous ne contestons pas l’existence du monde surnaturel », disait-il encore ; nous attendons qu’elle soit prouvĂ©e et nous nous renfermons jusqu’à nouvel ordre dans les bornes du rĂ©el. » Le ProgrĂšs, 1864, p. 9 De mĂȘme qu’Yves Guyot, dans sa prĂ©face Ă  la réédition de la Religieuse, expliquera en 1886 la nĂ©cessitĂ© de continuer le combat engagĂ© par Diderot contre les couvents oĂč l’on enferme les jeunes filles nubiles La Religieuse, 1886, p. xxxvi, de mĂȘme Edmond About affirmera que les fabricants de miracles sĂ©vissent toujours, que les vellĂ©itĂ©s autoritaires de l’Église ne sont pas de l’histoire, et que de nouvelles superstitions, plus sottes peut-ĂȘtre et plus rĂ©pugnantes, ont succĂ©dĂ© Ă  celles dont Voltaire avait fait justice. Le Dix-neuviĂšme siĂšcle, 18 juillet 1876 ; Ă©d. Reinach, 1892, p. 109 Dans cette entreprise, About jeta tout le sel, toute l’amertume et toute l’ironie qu’il puisait en lui, et il se rendit dĂ©testable Ă  quiconque conservait un souffle de conviction religieuse. Aujourd’hui encore, un honnĂȘte chrĂ©tien ne pourrait lire certaines de ses tirades sans grimace. Quand il Ă©voque les haras, il souligne par un Ă©loge feint les soins que donnaient Ă  cette Ɠuvre les moines de l’ancien temps, grands reproducteurs eux-mĂȘmes » Le ProgrĂšs, 1864, p. 167 ; et quand il Ă©voque les Papes, dans son traitement de la question romaine, il ne peut s’empĂȘcher d’appeler cette institution une dictature sempiternelle, oisive, taquine, ruineuse, que des vieillards hors d’ñge se transmettent de main en main » La question romaine, 1859, p. 123. À l’évidence, cette aigreur a participĂ© Ă  la cĂ©lĂ©britĂ© du personnage. Elle n’était d’ailleurs pas feinte, ni forcĂ©ment outrĂ©e. DĂšs ses jeunes annĂ©es Ă  l’École normale, raconte son ami Francisque Sarcey, About Ă©tait si fixĂ© dans son opposition Ă  la religion, qu’il ne pouvait plus voir un catholique. Quand Barnave [Charles Barnave, Ă©lĂšve comme eux et futur prĂȘtre] parle, son visage se contracte et, s’il lui rĂ©pond, les mots amers et blessants lui coulent de la bouche. » Il faut avouer aussi que Barnave le lui rend bien », continue Sarcey. Il y a un mot de lui qui est authentique Quand je vois passer About, disait-il, il me prend des envies soudaines de sauter sur lui, de l’étrangler de mes mains ; il me semble que je rendrais service Ă  la religion. » Journal de jeunesse de Francisque Sarcey, 1903, p. 141. Au-delĂ  de la violence du langage, il y a cependant, dans le combat anti-clĂ©rical d’Edmond About, quelques faits saillants qui mĂ©ritent d’ĂȘtre rappelĂ©s. D’abord, en exposant les principes du libĂ©ralisme Ă©conomique Ă  destination des ouvriers, il Ă©tait naturel qu’il blĂąmĂąt les prĂ©ceptes Ă©culĂ©s de l’Église catholique sur l’impuretĂ© de la richesse ou l’illĂ©galitĂ© du prĂȘt Ă  intĂ©rĂȘt. L’Assurance, 1865, p. xvii. De mĂȘme, quand il dĂ©fendait le mariage exclusivement civil ou les enterrements civils, en soutenant que personne ne doit ĂȘtre obligĂ© de payer les priĂšres qu’il ne consomme pas, il ne sombrait pas dans l’extravagance, mais promouvait une rĂ©forme de justice. Le Dix-neuviĂšme siĂšcle, 29 octobre 1878 ; Ă©d. Reinach, 1892, p. 251-252. Enfin, il ne sera pas dĂ©savouĂ©, malgrĂ© ses motifs, quand on le verra plaider pour le financement privĂ© des cultes, et quand on lira l’argument selon lequel l’État, Ă©tant une association gĂ©nĂ©rale pour la rĂ©pression du crime et la dĂ©fense du sol, ne doit pas se mĂȘler de sauver les Ăąmes. Le ProgrĂšs, 1864, p. 221 Peut-ĂȘtre certains des plus obstinĂ©s contre lui porteront-ils eux-mĂȘmes Ă  son crĂ©dit la longue lutte qu’il a menĂ©e dans les journaux contre certaines aberrations de l’esprit, qui se propageaient Ă  l’époque en dehors de la religion. MĂ©diums, somnambules, devins, cartomanciens, interprĂštes de songes toutes ces Ă©lucubrations se propageaient alors et disposaient de leurs propres journaux ; About en compte jusqu’à dix, et, dans le nombre, dit-il, pas un qui s’imprime Ă  Charenton », le cĂ©lĂšbre asile pour les aliĂ©nĂ©s Causeries, vol. II, 1866, p. 233. Ici se prĂ©sentent les faiseurs de miracles, comme les frĂšres Davenport, qui mĂ©ritent d’ĂȘtre dĂ©masquĂ©s, parce qu’ils s’enrichissent de la bĂȘtise humaine la plus crasse ; lĂ  se tiennent les mĂ©diums, les spiritistes, qui invoquent les spectres, font parler les morts, et forcent Socrate, CicĂ©ron ou Lamennais, Ă  Ă©crire en français mĂ©diocre un supplĂ©ment Ă  leurs Ɠuvres posthumes. Idem Ce mysticisme pour les esprits faibles, les vieillards et les femmes, serait peut-ĂȘtre Ă  laisser en paix, s’il ne menaçait pas le fonctionnement normal de la sociĂ©tĂ©, en renversant les promesses donnĂ©es, en dĂ©pouillant des hĂ©ritiers lĂ©gitimes ou en jetant sans direction dans les opĂ©rations de la Bourse des fortunes patiemment acquise et qui s’y dissipent. Idem, p. 247-248 Mais lorsque ses ravages sont connus, les hommes de bonne volontĂ© ont bien le droit d’avertir les esprits niais qu’on les trompe. Tout au long de sa croisade anti-religieuse, Edmond About a Ă©tĂ© accusĂ© de fouler aux pieds la libertĂ© de conscience. Il s’en est dĂ©fendu Ă  plusieurs reprises. En discrĂ©ditant les aberrations du mysticisme, d’abord, il ne condamnait pas ses adeptes Ă  la pĂ©nitence ou au mĂ©pris ; au contraire il demandait la bienveillance, et se contentait de donner des avertissements, semblable Ă  celui qui a observĂ© la force de la houle et conseille aux baigneurs de prendre garde. Ce n’est pas attenter Ă  la libertĂ© des moutons que de crier au loup ! » Ă©crivait-il au cours de sa controverse contre le spiritisme. Causeries, vol. II, 1866, p. 266 Il ne mobilisait pas un autre argumentaire lorsque, ayant acceptĂ© la concurrence des Ă©coles religieuses pour l’enfance, oĂč il s’agissait surtout de lecture et d’écriture, il refusait absolument que l’Église puisse se mĂȘler de l’enseignement secondaire. Quoique sa prĂ©fĂ©rence fĂ»t toute accordĂ©e Ă  l’enseignement libre, il reconnaissait Ă  l’État lui-mĂȘme une supĂ©rioritĂ©, Ă  cet Ă©gard, sur l’enseignement religieux. Tout est perfectible dans l’État », expliquait-il, tout est immuable dans l’Église. L’enseignement laĂŻque fĂ»t-il organisĂ© le plus sottement du monde, subordonne tous ses programmes Ă  l’autoritĂ© du progrĂšs. Il peut ĂȘtre myope, maladroit, traĂźnard, musard et occupĂ© de cent niaiseries ; il conserve malgrĂ© tout le vague instinct de la route Ă  suivre il marche en trĂ©buchant vers le but de l’humanitĂ© qui est lĂ -bas, en avant. L’enseignement clĂ©rical place le but en arriĂšre. Donc, plus il est habile, insinuant et caressant, mieux il Ă©gare la jeunesse. » Le ProgrĂšs, 1864, p. 402 Aussi, la libertĂ© ne pouvait ĂȘtre attribuĂ©e Ă  une institution qui avait pour vocation et pour rĂ©sultat de tromper son jeune public et d’égarer leur esprit, et pour se servir d’une expression populaire, la libertĂ© ne pouvait ĂȘtre donnĂ©e aux ennemis de la libertĂ©. AssurĂ©ment », Ă©crivait-il pour s’expliquer, la libertĂ© est la plus noble chose du monde. Toutes les libertĂ©s me sont Ă©galement chĂšres, sauf une cependant la libertĂ© de ceux qui me guettent la nuit, au coin de la rue, pour me tordre le cou. » Le Dix-neuviĂšme siĂšcle, 7 dĂ©cembre 1879 ; Ă©d. Reinach, 1892, p. 288-289. Et il visait l’Église catholique dans cette dĂ©nonciation. [La face sombre d’About. Ses compromissions] Edmond About est comme tout homme qui pense un auteur chez qui les qualitĂ©s et les dĂ©fauts s’entremĂȘlent. Lecteur averti, observateur perspicace, il paraĂźt parfois soutenir machinalement les bons principes ; c’est toutefois une sĂ©curitĂ© de façade, une force de conviction qui cache le dĂ©faut de l’enthousiasme et de la prĂ©cipitation. Ses capacitĂ©s de prĂ©diction, de mĂȘme, Ă©taient mĂ©diocres. Il a passĂ© sa vie Ă  prĂ©dire des Ă©vĂ©nements qui se sont dĂ©roulĂ©s selon une sĂ©quence prĂ©cisĂ©ment contraire. La destruction du monopole de la boucherie, de la charcuterie, et quelques autres, sous l’impulsion de NapolĂ©on III, lui fit croire par exemple que la tendance naturelle du progrĂšs ne connaĂźtrait plus de revirement, et il promettait Ă  la gĂ©nĂ©ration qui le lisait qu’elle verrait tomber tous les privilĂšges. Le ProgrĂšs, 1864, p. 288 En 1868, il Ă©crivait pareillement que le socialisme a livrĂ© son dernier combat sous nos yeux, en juin 1848. Il est non seulement vaincu, mais dĂ©sarmĂ© par le progrĂšs des lumiĂšres et le redressement des esprits. » A B C du travailleur, 1868, p. 155 Enfin, dans son analyse de la politique europĂ©enne, il appela de ses vƓux pendant des annĂ©es des rapports d’ouverture et de confiance avec l’Allemagne cette fois la rĂ©futation par les faits se passerait sous ses yeux, et elle serait amĂšre. Dans le domaine de la thĂ©orie, About a tant Ă©crit que les contradictions ne sauraient nous Ă©tonner ce qui marque davantage, c’est la persistance de certaines convictions qu’au regard des principes ordinairement dĂ©fendus par les libĂ©raux français, on peut appeler proprement hĂ©tĂ©rodoxes. Ainsi, lorsqu’il refuse Ă  l’Église catholique la libertĂ© de participer au marchĂ© concurrentiel de l’enseignement secondaire, il paraĂźt compromettre ses principes au profit de ses convictions. Il n’en est pas autrement, lorsqu’il s’enthousiasme pour le mĂ©canisme de l’assurance sur la vie, et que, regrettant le retard des compagnies privĂ©es Ă  cet Ă©gard, il se tourne du cĂŽtĂ© de l’État pour un rĂŽle de facilitateur. Le capital pour tous, 1868, p. 22 On peut classer les compromissions d’Edmond About dans deux grandes catĂ©gories, qui correspondent aussi Ă  deux pĂ©riodes distinctes de sa vie. Dans la premiĂšre, jeune Ă©crivain ambitieux, il se lie au pouvoir en place et produit des Ɠuvres de circonstance, dans lesquelles il loue servilement la personnalitĂ©, les accomplissements et les projets de l’empereur, comme le ferait non un intellectuel, mais un fidĂšle et un protĂ©gĂ©. Dans la seconde, son patriotisme enflammĂ© par les Ă©vĂšnements le conduit Ă  des propositions peu consensuelles. [About le courtisan] About affirme lui-mĂȘme, dans l’un des passages de ses Ɠuvres, qu’il n’est pas homme Ă  se compromettre ou Ă  flatter servilement je ne suis pas de ceux qui usent leurs pantalons aux genoux », Ă©crit-il exactement Causeries, vol. II, 1866, p. 148. Ce type de formule ne doit pas nous en imposer, pas plus que la grande et cĂ©lĂšbre profession de foi de Benjamin Constant, sur ses quarante annĂ©es de mĂȘme constance dans la dĂ©fense d’un libĂ©ralisme rigoureux, ne doit convaincre d’emblĂ©e l’historien scrupuleux. MĂ©langes de littĂ©rature et de politique, 1829, p. vi Edmond About, qui d’abord publia des articles de journaux critiques envers NapolĂ©on III, en devint plus tard un sympathisant, et Ă©crivit plusieurs ouvrages sous son influence et son patronage, sinon tout Ă  fait sous sa dictĂ©e. C’est le cas de La question romaine 1859, de La nouvelle carte de l’Europe1860 ou de La Prusse en 1860 1860. Sa conversion avait Ă©tĂ© facilitĂ©e par son opposition de jeune homme aux exaltations rĂ©volutionnaires, et au fait que s’il pensait que la rĂ©publique Ă©tait un joli gouvernement, il croyait aussi qu’on doit prendre le temps comme il vient et tirer le meilleur parti possible du gouvernement que l’on a. » Lettres d’un bon jeune homme Ă  sa cousine Madeleine, 2e Ă©dition, 1861, p. iii Pour un temps, ce grand artisan du progrĂšs et des libertĂ©s humaines s’abaissait Ă  vanter la grandeur et la force, semblable Ă  cette Ă©glise catholique dont il avait mĂ©dit en notant, dans les placards du ProgrĂšs, que qui dit clergĂ©, dit prudence et respect du pouvoir tant qu’il est fort ». BibliothĂšque de l’Institut, Ms. 3984Lui-mĂȘme trouvait alors Ă  justifier le pouvoir autoritaire de l’empereur. Il est vrai que l’empereur NapolĂ©on travaille Ă  la grande et Ă  la prospĂ©ritĂ© de la France avec un pouvoir trĂšs Ă©tendu », Ă©crivait-il. Mais ce pouvoir, c’est la nation qui le lui a confiĂ©. Y a-t-il dans toute l’Allemagne un seul prince qui soit le dĂ©putĂ© de la nation, Ă©lu comme NapolĂ©on III par le suffrage universel ? Il est vrai que la majoritĂ© des Français obĂ©it, et mĂȘme avec un certain empressement, Ă  l’empereur NapolĂ©on. Mais cette obĂ©issance est Ă©gale pour tous, comme l’obĂ©issance aux lois, comme le paiement des impĂŽts. C’est une obĂ©issance dĂ©mocratique, parce qu’elle a Ă©tĂ© votĂ©e d’avance par tout le monde, et parce que nul Français n’a le droit de s’y soustraire. » La Prusse en 1860, 1860, p. 18 Cette obĂ©issance dĂ©mocratique », et autres bassesses indignes de lui, valurent Ă  About des mĂ©disances et des reproches. L’échec retentissant de GaĂ«tana 1862, dont il a Ă©tĂ© parlĂ© prĂ©cĂ©demment, n’eut d’ailleurs par d’autre cause. Si la jeunesse parisienne a refusĂ© de voir cette piĂšce se jouer paisiblement, racontera un Ă©tudiant, ce n’est pas pour des dĂ©fauts de style ou d’intrigue. Nous nous bornons Ă  ne pas aimer votre caractĂšre politique ; et voilĂ  pourquoi GaĂ«tana a Ă©tĂ© sifflĂ©e. » À Monsieur E. About. Lettre d’un Ă©tudiant, 1862, p. 12 Revenu, peu Ă  peu, de cet enthousiasme mal placĂ©, About fit amende honorable, avouant beaucoup de sottises ». J’en ai fait par paroles, par actions et par Ă©crit. Il y a lĂ , dans la bibliothĂšque, vingt-cinq volumes dont les trois quarts auraient pu se dispenser de naĂźtre. Que d’erreurs, de contradictions, de malices inutiles et de violences dangereuses ! Combien d’engouements dont on est revenu, et de sĂ©vĂ©ritĂ©s sur lesquelles on voudrait pouvoir revenir ! Baste ! ce qui est fait est fait ; tous nos actes se tiennent par un enchaĂźnement nĂ©cessaire. Le plus clair de tout ceci est que j’ai rudement travaillĂ© ; que je n’ai jamais exprimĂ© une pensĂ©e qui ne me parĂ»t vraie dans le moment ; que mes sottises les moins vĂ©nielles n’ont guĂšre nui qu’à moi-mĂȘme, et que je puis me les pardonner, car elles ne m’empĂȘchent pas d’ĂȘtre heureux. Quand je passerais une autre douzaine d’annĂ©es Ă  corriger ce que j’ai fait, le monde n’en irait pas mieux. Le parti le plus sage est de tourner le dos au passĂ©, de voir le bien qui reste Ă  faire, les vĂ©ritĂ©s qui restent Ă  dire, et de choisir son lot dans cet Ă©norme travail. » Causeries, vol. II, 1866, p. 338-339. Il n’en continua pas moins de louer certaines actions de NapolĂ©on III, et de s’associer Ă  nombre de ses projets de rĂ©formes ; mais il le fit avec discernement, en symbiose avec les principes de libertĂ© qu’il chĂ©rissait et dont il s’était fait le populaire dĂ©fenseur. Ainsi, il pouvait lĂ©gitimement fĂ©liciter l’empereur d’avoir Ă©crit ce crĂ©do remarquable, selon lequel il faut Ă©viter cette tendance funeste qui entraĂźne l’État Ă  exĂ©cuter lui-mĂȘme ce que les particuliers peuvent faire aussi bien et mieux que lui. » Le ProgrĂšs, 1866, p. 177 De mĂȘme, il pouvait vanter dans l’A B C du travailleur la suppression des passeports, la libertĂ© de la boulangerie, de la boucherie, de l’imprimerie, de la librairie et des entreprises dramatiques ; l’abolition du monopole qui avait accaparĂ© les voitures de Paris ; le droit de coalition qui permet aux ouvriers de lutter Ă  armes courtoises, mais Ă©gales, avec leurs patrons ; la libertĂ© du courtage ; la fin du maximum qui rĂ©gissait la vente du pain ; et enfin une rĂ©volution radicale dans le systĂšme douanier. A B C du travailleur, 1868, p. 162 Et quant au pouvoir personnel de l’empereur et Ă  son autoritĂ© sans bornes, About la plaçait dĂ©sormais sous la responsabilitĂ© du bon peuple de France, qui fut assez bĂȘte pour signer par deux fois un bail indĂ©fini et sans conditions avec le premier homme qui fĂ»t venu lui offrir un peu de sĂ©curitĂ©. Causeries, vol. II, p. 186-187. [Bellicisme] Venons-en dĂ©sormais Ă  la deuxiĂšme Ă©poque des compromissions d’Edmond About. En 1860, celui-ci promouvait une politique d’amitiĂ© avec l’Allemagne ; c’est un errement dont il revint. Mais lorsque la menace d’une absorption de l’Allemagne par la Prusse se dessina, son nationalisme et sa ferveur ne connurent plus de bornes, et il s’engagea par la plume pour la dĂ©fense de l’idĂ©e d’une guerre protectrice. Certes, le conflit franco-prussien allait Ă©craser les dissentiments doctrinaux, et les pacifistes eux-mĂȘmes se trouveraient impuissants. Mais sans doute y a-t-il plus d’honneur Ă  s’ĂȘtre trouvĂ© aux cĂŽtĂ©s de FrĂ©dĂ©ric Passy ou de Joseph Garnier, Ă©crivant au Roi de Prusse en octobre 1870 pour qu’il cesse les hostilitĂ©s et Ă©coute leurs raisons FrĂ©dĂ©ric Passy, Historique du mouvement de la paix, 1904, p. 35, plutĂŽt qu’à avoir, comme About, pestĂ© contre le parti des doux », qui refusent la guerre ou font d’immenses efforts pour l’éviter. La guerre est une triste nĂ©cessitĂ©, d’accord », Ă©crivait-il dans sa ferveur. Il est Ă  souhaiter que les nations rĂšglent leurs intĂ©rĂȘts Ă  l’amiable ; mais tant qu’il y aura des ambitieux et des violents sur les trĂŽnes, il faudra bien opposer le chassepot au fusil Ă  aiguille, et prĂȘter main forte au bon droit
 Le paysan, l’ouvrier, le marchand ont cent raisons pour une d’aimer la paix, mais lorsqu’ils sentent que l’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral est en danger, ils ne se dĂ©pensent pas en pleurnicheries humanitaires, ils n’épiloguent pas sur les prĂ©textes, ils ne demandent pas si le gouvernement a besoin de se refaire une popularitĂ© ; ils disent tout simplement va pour la guerre ! Faisons-la bonne, puisqu’il n’y a pas moyen de l’éviter, et plaise Ă  Dieu que celle-ci soit la derniĂšre ! » Le Soir, 17 juillet 1870. Lorrain de naissance, devenu parisien par nĂ©cessitĂ©, About fut surtout un Alsacien d’adoption, et c’est dans sa demeure de la Schlittenbach commune de Saverne qu’il Ă©crivit la plupart des ouvrages qui forment le fond de cet article. La dĂ©faite de la France entraĂźnait donc Ă  sa suite, non seulement un dĂ©menti formel Ă  ses Ă©lucubrations diplomatiques du dĂ©but des annĂ©es 1860, mais aussi la fin de sa vie paisible en Alsace. C’est ce qui explique, sans toutefois la justifier, la grande ardeur qu’il dĂ©montra durant la douzaine d’annĂ©es qui lui restait Ă  vivre, contre tout projet de rapprochement avec l’Allemagne ou d’accord, d’accommodement avec ce pays ennemi. C’était, de son point de vue, une question d’honneur national. Quel que soit l’intĂ©rĂȘt qui puisse nous conseiller un jour de rechercher ou d’accepter l’alliance des Allemands, nous ne le pouvons pas ; l’histoire nous flĂ©trirait comme une nation de pleutres. » Le Dix-neuviĂšme siĂšcle, 18 novembre 1884 ; Ă©d. Reinach, 1892, p. 390 [Colonialisme] Ce mĂȘme motif de l’honneur national fit prendre Ă  l’engagement d’About un nouveau tour curieux une fois la guerre franco-prussienne terminĂ©e. Dans le ProgrĂšs, il avait dĂ©fendu le droit populaire et l’indĂ©pendance des nationalitĂ©s, soutenant mĂȘme que rĂ©volutionner les gens malgrĂ© eux, c’est encore les opprimer. Chaque association d’hommes est maĂźtresse de ses destinĂ©es. Si quelqu’un se complaĂźt dans l’obĂ©issance ou dans la dĂ©pendance, personne n’a le droit de l’affranchir contre son grĂ©. » Le ProgrĂšs, 1864, p. 461, 435. Sur un autre plan, il avait, ainsi qu’il a Ă©tĂ© expliquĂ©, affirmĂ© la solidaritĂ© des peuples de toutes les couleurs et de toutes la nationalitĂ©s, et il se disait opposĂ© Ă  l’idĂ©e de l’inĂ©galitĂ© des races L’Assurance, 1865, p. 29 ; Causeries, vol. II, 1866, p. 345. À cette Ă©poque, il remarquait qu’au centre de l’Afrique ou sur quelques Ăźles de l’OcĂ©anie se trouvaient des peuplades que l’angle facial, le volume du cerveau et les facultĂ©s intellectuelles plaçaient encore, disait-il, au niveau du gorille, ou peu s’en faut, et il les appelait les traĂźnards de l’armĂ©e » Le ProgrĂšs, 1864, p. 17-18. Mais c’est surtout la dĂ©faite de 1870 qui crĂ©a chez lui ce besoin vital du rebond ; et comme une grande partie de sa gĂ©nĂ©ration, c’est dans la colonisation qu’il trouva l’opportunitĂ© de ce sursaut d’honneur national. Ses biographes s’accordent pour dire que dans les derniĂšres annĂ©es de sa vie, Edmond About a Ă©tĂ© un dĂ©fenseur passionnĂ© de la colonisation, et que ce thĂšme devint alors l’un de ses favoris. Albert ThiĂ©baut, Edmond About, 1936, p. 172 ; Rey, EdmondAbout ou les tribulations d’un petit-fils de Voltaire au XIXe siĂšcle, 2003, p. 301. Il devint mĂȘme prĂ©sident de la SociĂ©tĂ© française de colonisation, fondĂ©e primitivement Ă  Brest en juillet 1883 par M. Froger, professeur Ă  l’École navale. À cette Ă©poque, ses convictions s’étaient raidies, et les vieilles apprĂ©hensions qu’il avait manifestĂ©es dans certains de ses ouvrages, notamment sur la mĂ©diocre et incertaine » compensation que la Cochinchine offrait Ă  la perte de Madagascar, oĂč les Français s’étaient ruĂ©s en masse au profit des jĂ©suites qui nous taillent des croupiĂšres Ă  Paris », Ă©taient abandonnĂ©es au profit d’une conviction plus sereine Le ProgrĂšs, 1864, p. 322 et 476. La dĂ©chĂ©ance nationale, symbolisĂ©e par la dĂ©faite, avait blessĂ© sont cƓur patriotique ; or il fallait offrir autre chose Ă  la France, cette grande et malheureuse nation dĂ©membrĂ©e, ruinĂ©e, humiliĂ©e, relĂ©guĂ©e au second ou au troisiĂšme rang des puissances europĂ©ennes », et Ă  son peuple, privĂ© de destin, et jouissant alors du triste avantage de n’ĂȘtre rien. » Le Dix-neuviĂšme siĂšcle, 21 septembre 1877 ; Ă©d. Reinach, 1892, p. 183 ; Idem, Le Dix-neuviĂšme siĂšcle, 30 mai 1876 ; Ă©d. Reinach, 1892, p. 106 Son programme colonial s’établissait ainsi dans la certitude, quoique dans les modalitĂ©s About accorda une large place aux circonstances politiques. Ses articles, dans les journaux auxquels il a contribuĂ© ou qu’il a dirigĂ© Ă  cette Ă©poque, professent la nĂ©cessitĂ© de tirer parti des occasions, afin d’accomplir un projet conçu comme vital pour le pays. SerrĂ©s, contraints, presque Ă©touffĂ©s dans nos nouvelles et dĂ©plorables frontiĂšres », Ă©crit-il par exemple, les Français de 1883ne peuvent respirer librement que loin d’ici. Nosvieilles colonies sont mortes, ou bien malades. Il nous faut Ă  tout prix en crĂ©er de nouvelles, sous peine de glisser au rang des peuples dĂ©chus. Le dernier ministre Ferry nous a donnĂ© la Tunisie que nous tenons et que nous garderons, quoi qu’il en coĂ»te. L’expĂ©dition de M. de Brazza nous promet une France africaine au Congo il faut la prendre. Nous avons des droits incontestĂ©s sur l’üle de Madagascar il faut les maintenir. Le protectorat du Tonkin s’impose aux maĂźtres de la Cochinchine il faut nous Ă©tablir au Tonkin. » Le Dix-neuviĂšme siĂšcle, 9 avril 1883 ; Ă©d. Reinach, 1892, p. 349 About n’en avait pourtant pas perdu sa clairvoyance. Quoiqu’il ait pu ĂȘtre lĂ©gitiment tenu pour l’un des responsables, il s’attristait de l’expansion fĂ©roce et maladroite du territoire colonial français, et il soutenait qu’en matiĂšre de colonisation, les gouvernements successifs s’étaient comportĂ©s comme ces enfants Ă  qui l’on dit qu’ils ont eu les yeux plus gros que le ventre. Mieux vaudrait possĂ©der moitiĂ© moins de sujets exotiques, jaunes ou noirs, et qu’ils fussent plus positivement Ă  nous » Ă©crivait-il. Le Dix-neuviĂšme siĂšcle, 18 novembre 1884 ; Ă©d. Reinach, 1892, p. 389 About savait en outre que dans beaucoup de territoires la prĂ©sence française faisait naĂźtre des oppositions dangereuses, et qu’en derniĂšre analyse elle absorbait et absorberait encore pendant longtemps des masses de capitaux immenses et un nombre d’hommes considĂ©rable. Mais ces considĂ©rations, qui par le passĂ© n’avaient pas arrĂȘtĂ© Beaumont, Tocqueville et de nombreux autres, ne devait pas non plus renverser sa conviction, fermement ancrĂ©e dans les commandements de l’honneur national. Aussi, lorsqu’il soulignait des errements, des travers ou des fautes, il n’en maintenait pas moins la cause de la colonisation. C’est vrai, le plus clair du profit qu’on peut empocher au Tonkin est dans les coups », reconnaĂźt-il ainsi Ă  la veille de sa mort. Mais j’aime Ă  supposer que la France n’a pas encore abjurĂ© les sentiments chevaleresques qui l’ont fait appeler si longtemps la grande nation. » Le Dix-neuviĂšme siĂšcle, 8 janvier 1885 ; Ă©d. Reinach, 1892, p. 394 Ces paroles furent prononcĂ©es quelques mois avant que ne s’ouvre au Parlement, tout juste renouvelĂ©, un grand dĂ©bat sur la colonisation, oĂč s’illustrĂšrent Georges Clemenceau, Jules Ferry, et, parmi les libĂ©raux, FrĂ©dĂ©ric Passy. About, mort le 16 janvier 1885, n’assista pas Ă  cette furieuse passe d’armes. [RĂ©cente popularitĂ© de son livre sur la GrĂšce] Avant d’en finir tout Ă  fait avec Edmond About, je dois un mot d’explication sur le rĂ©cent regain de popularitĂ© de son ouvrage sur la GrĂšce. Au dĂ©but des annĂ©es 2010, tandis que ce pays se dĂ©battait au milieu des difficultĂ©s financiĂšres les plus graves, et que les accusations de malversations fusaient en sa direction, l’attention se porta Ă  nouveau sur le livre pĂ©tillant d’About, publiĂ© pour la premiĂšre fois en 1854, et qui connut ensuite une dizaine de rééditions. Les journalistes et les Ă©ditorialistes se passĂšrent le mot pour dĂ©lecter leurs lecteurs avec des morceaux choisis de cette Ɠuvre venue d’outre-tombe pour les Ă©difier. Les parallĂšles, en effet, Ă©taient frappants. About Ă©voquait dans ce livre un pays vivant dans un Ă©tat de banqueroute permanent, et qui, incapable de lever proprement ses impĂŽts, accumulait des dĂ©ficits depuis plus de vingt ans. La GrĂšce contemporaine, 1854, p. 308-309. Son administration, incapable ou corrompue, prouvait chaque jour quelque qu’elle ne savait pas se faire respecter et semblait douter d’elle-mĂȘme. Idem, p. 66 Celui qui a pour seule ambition de flatter les passions de son lectorat et de vendre du papier Ă  moindre effort, peut Ă  la rigueur s’en tenir Ă  ces phrases. Mais pour nous qui analysons les origines et les manifestations de la pensĂ©e libĂ©rale française, nous demandons autre chose que les grands effets du théùtre. La GrĂšce contemporaine fut le premier ouvrage d’About. Il l’écrivit entre 25 et 26 ans, aprĂšs un sĂ©jour en GrĂšce qui le lançait dans le monde, ses annĂ©es d’étude Ă  l’École normale tout juste terminĂ©es. Son esprit railleur, sa pĂ©tulance de jeune homme devaient s’y reprĂ©senter pleinement. Ayant rĂ©ussi l’agrĂ©gation, mais ne se sentant aucune vocation pour l’enseignement, surtout sous un rĂ©gime tel que celui inaugurĂ© par le coup d’État de Louis-NapolĂ©on Bonaparte, About avait trouvĂ© une Ă©chappatoire dans l’École d’AthĂšnes. Cependant le jeune homme qui dĂ©barqua sur le quai du PirĂ©e le 3 novembre 1852 n’apprĂ©ciait que mĂ©diocrement les antiquitĂ©s et l’archĂ©ologie, et dans tous ses dĂ©placements il manifestera son allergie aux vieilles pierres. Lorsque six mois plus tĂŽt, il avait visitĂ© l’Exposition universelle de Londres, au milieu de ses examens de l’agrĂ©gation, About avait suivi ses penchants ; en montant sur le navire qui l’emmenait en GrĂšce, il ne faisait que saisir une occasion. D’une nation Ă  l’autre, le contraste Ă©tait saisissant, et c’est ce qui marqua d’abord About, Ă©pris du progrĂšs, admirateur des beautĂ©s de la civilisation. En Angleterre, il racontait avoir surtout admirĂ© les machines impressionnantes prĂ©sentĂ©es Ă  l’Exposition. Paul Bonnefon, Edmond About Ă  l’École normale et Ă  l’École d’AthĂšnes », Revue des deux-mondes, 1915, p. 196 Un tout autre spectacle se prĂ©sentait Ă  lui en GrĂšce, comme il le raconte Ă  Arthur Bary, son compagnon de voyage Ă  Londres. J’ai bien des fois regrettĂ© que vous ne fussiez pas avec moi », lui Ă©crit-il. AprĂšs le spectacle de l’activitĂ© anglaise et des beaux rĂ©sultats qu’elle a produits, vous auriez vu ici le triste tableau des effets de la paresse. AthĂšnes est un horrible village, en comparaison de la plus petite ville d’Angleterre. Point de pavĂ©, point d’éclairage ; des maisons bĂąties Ă la hĂąte avec de la terre, ou, ce qui est pis, avec des chefs-d’Ɠuvre en dĂ©bris ; une campagne ou inculte ou mal cultivĂ©e les paysans croient avoir assez fait quand ils ont grattĂ© l’épiderme de la terre, et les AthĂ©niens de la ville se croiraient dĂ©shonorĂ©s de porter un fardeau. Ils vont faire les beaux dans la ville et s’étaler au soleil dans leur brillant costume voilĂ  la seule occupation qui leur semble digne d’eux. Il y a plus d’honorabilitĂ© barbarisme anglais dans un ouvrier de Liverpool, noir de charbon, que dans cinquante de ces gens d’opĂ©ra-comique qui pavent les rues ici. Mais je ne veux pas en dire trop de mal avant d’avoir fait plus ample connaissance je ne suis ici que de ce matin. Et s’il faut se garder de juger un homme Ă  premiĂšre vue, Ă  plus forte raison quand il s’agit d’un peuple. Cependant, quand vous voyez un homme qui sort en savates, vous avez quelque droit de penser mal de lui ; de mĂȘme pour une nation et ici, la ville et la campagne sont en savates. » Idem, p. 199-200. La suite de son sĂ©jour fut pĂ©nible. D’abord, il fallait accomplir les devoirs de son Ă©tat, et justifier son voyage par l’écriture de quelque mĂ©moire acadĂ©mique, comme celui qu’il donna Ă  l’AcadĂ©mie des Inscriptions sur Égine au point de vue gĂ©ographique, historique et artistique. Allergique aux vieilles pierres, About Ă©tait l’homme du monde le plus inapte Ă  ces travaux, et il avançait dans cette carriĂšre avec la plus grande rĂ©pulsion, voyant son talent frappĂ© d’inertie et se mouvant avec peine, comme une machine sans ressort. Le travail ingrat et stupide auquel je me livre depuis quelques jours m’a fait pousser des pommes de terre dans mon cerveau », Ă©crit-il Ă  sa mĂšre en mai 1853, au milieu de l’un de ces travaux. BibliothĂšque de l’Institut, Ms. 3983, f° 289, lettre du 15 mai 1853. Les travaux officiels lui Ă©taient d’ailleurs d’autant plus dĂ©plaisants, qu’il s’était attirĂ© assez tĂŽt les rages de ses directeurs, pour avoir fait preuve d’une trop grande autonomie. En aoĂ»t 1852, il raconte ainsi avoir reçu des copies de son article sur le buste de David d’Angers. J’en ai reçu deux exemplaires », Ă©crit-il Ă  sa mĂšre, dont j’ai portĂ© l’un Ă  M. Daveluy qui m’a lavĂ© proprement la tĂȘte. Il m’a remontrĂ© trĂšs vertement qu’un fonctionnaire ne doit rien Ă©crire si ce n’est sous la dictĂ©e de son chef immĂ©diat. » Idem, f°80, 16 aoĂ»t 1852. Tout semblait fait pour le dĂ©goĂ»ter. La fin de son sĂ©jour ne pouvait arriver trop tĂŽt. En juin 1853, il l’entrevoyait, et l’amertume dont son cƓur Ă©tait plein, trouvait alors son exutoire. La GrĂšce physique elle-mĂȘme, avec son soleil brĂ»lant et ses paysages superbes, n’était pas en cause. Ce n’est pas que j’aime Ă  calomnier le pays oĂč je me suis tant ennuyĂ© », disait About, ce pauvre pays, je ne lui en veux pas, il fait de son mieux pour ĂȘtre beau. » Idem, Ă  sa mĂšre, f°266, 7 juin 1853. Mais de Paris ou de Londres, il lui manquait les grandeurs de la civilisation matĂ©rielle et la conversation des esprits avancĂ©s. Il y a des moments oĂč je donnerais tout, soleil, olives, ravins, chevaux, pour une petite place au coin d’une cheminĂ©e, entre trois hommes d’esprit et quatre jolies femmes », disait-il alors. Idem. À son retour, About fait la rencontre de Louis Hachette, qui lui suggĂšre d’écrire un livre. Il a dĂ©jĂ  des notes abondantes et un premier projet d’écriture non continuĂ©. Les choses se passent vite et l’ouvrage paraĂźt en 1854. On trouve, dans la GrĂšce contemporaine, un constant besoin de faire de l’esprit, qui emporte parfois l’auteur au-delĂ  du vĂ©ridique et mĂȘme du vraisemblable, et on peut le prendre plusieurs fois la main dans le sac, coupable d’avoir raillĂ© pour le seul plaisir de faire un bon mot. Quand il Ă©voque ce Quimper-Corentin glorieux que nous vĂ©nĂ©rons sous le nom d’AthĂšnes » La GrĂšce contemporaine, 1854, p. 95, ou quand il fustige Corinthe, cette seconde AthĂšnes, qui a produit tant de chefs-d’Ɠuvre et qui ne produit plus que des raisins » Idem, p. 26, il nous dresse plus que la gĂ©ographie de son ennui en GrĂšce il raille, en homme qui aime Ă  railler. De façon similaire, quand il marque qu’à la tĂȘte de l’État, le roi examine les lois sans les signer, la reine les signe sans les examiner » Idem, p. 350, il a cĂ©dĂ© au plaisir de lancer un bon mot. Par consĂ©quent, s’il est capable parfois d’ĂȘtre lucide, et si le contre-pied qu’il prend des Ă©loges outrĂ©s de la GrĂšce s’avĂšre postĂ©rieurement une position justifiĂ©e, son livre n’est pas celui d’un adversaire dĂ©terminĂ© de la GrĂšce. C’est bien plutĂŽt un sceptique, dĂ©terminĂ© Ă  se gausser de tout et quelquefois par consĂ©quent de rien », qui fait le pendant, presque malgrĂ© lui, entre le philhellĂšnisme finissant et le mishellĂšnisme bientĂŽt vainqueur Sophie Basch, Le mirage grec la GrĂšce moderne devant l’opinion française, 1995, p. 115. Au milieu ces deux tendances, About avançait par ses propres forces et en suivant la pente de ses sentiments. Aux Grecs, il reconnaissait de nombreuses vertus, et notamment, dans le domaine politique, l’amour de la libertĂ©, le sentiment de l’égalitĂ©, et le patriotisme. La GrĂšce contemporaine, 1854, p. 61 Il faisait aussi, avec beaucoup de clairvoyance, de ce pays une terre naturelle d’individualisme, analysant trĂšs bien comment le dĂ©coupage du pays en fractions par les montagnes et la mer, avait dĂ» donner naissance Ă  une multitude d’États indĂ©pendants qui favorisĂšrent le dĂ©veloppement des droits humains. Dans chacun de ces États », Ă©crit-il, le citoyen, au lieu de se laisser absorber par l’ĂȘtre collectif ou la citĂ©, dĂ©fendait avec un soin jaloux ses droits personnels et son individualitĂ© propre. S’il se sentait menacĂ© par la communautĂ©, il trouvait refuge sur la mer, sur la montagne, ou dans un État voisin qui l’adoptait. » Idem, p. 55 On peut aussi saluer la comprĂ©hension assez fine qu’il manifesta du problĂšme Ă©conomique grec. About parle d’une terre riche, qui ne manque que de capitaux et de routes pour ĂȘtre proprement mise en valeur. Les capitaux ne manqueraient pas, si les affaires offraient quelque sĂ©curitĂ©, si les prĂȘteurs pouvaient compter ou sur la probitĂ© des emprunteurs, ou sur l’intĂ©gritĂ© de la justice, ou sur la fermetĂ© du pouvoir. Les routes ne manqueraient pas, si les revenus de l’État, qu’on gaspille pour entretenir une flotte et une armĂ©e, Ă©taient employĂ©s Ă  des travaux d’utilitĂ© publique. » Idem, p. 140 Il appelait ainsi le gouvernement grec Ă  faire son devoir », en fournissant les services qu’un libĂ©ral honnĂȘte, mais non tout Ă  fait radical, comme About, devait lui demander construire les infrastructures, et fournir la justice. BenoĂźt Malbranque

VidĂ©o: Sylvie Marx - Tout ce que l'on exprime pas, notre corps l'imprime. Emission du 12/03/2019 TOUT CE QUE L'ON EXPRIME PAS, NOTRE CORPS L'IMPRIME. EMISSION DU 12/03/2019. dĂ©couvrez ma prestation en rapport avec cette vidĂ©o . THÉRAPIE ADIOS ADDICTIONS, TABACOLOGIE, ALCOOLOGIE, ÉCRANS, SUCRE

À l’écoute des messages du corps âšĄïž Prend sur toi Â»âšĄïž Serre les dents Â»âšĄïž Fais le dos rond Â»âšĄïž Encaisse Â»âšĄïž Il faut s’endurcir » Merveilleuses injonctions. J’ai aussi remarquĂ© que les gens qui nous donnent ces conseils, souffrent eux-mĂȘmes de devoir les mettre en application Alors pourquoi continuer dans une voie qui, de toute Ă©vidence, crĂ©e des souffrances ? âšĄïž S’il est normal de ressentir des Ă©motions et des sentiments, il l’est tout autant de les exprimer Si une Ă©motion tape Ă  la porte, ouvrez elle a quelque chose Ă  vous dire Écoutez le message, entendez la part de vous qui essaye de s’exprimer Si vous entendez le message, l’émotion s’évanouira car elle aura fait son travail vous alerter Si, par contre, vous refermez la porte, l’émotion tapera de plus en plus fort jusqu’à ce que vous rĂ©ceptionniez le message qu’elle a pour mission de vous transmettre âšĄïž Entendre le message, ce n’est pas seulement reconnaitre telle ou telle Ă©motion Identifier la frustration, la peine, l’irritation, l’ennui, l’aversion, c’est un premier pas Ensuite, il s’agit d’Être en cohĂ©rence avec ces Ă©motions, il s’agit de se positionner en consĂ©quence dans les mots, et dans les actes âšĄïž C’est la rĂ©pĂ©tition durĂ©e + frĂ©quence d’un mĂȘme comportement qui est problĂ©matique À force, on ne rĂ©flĂ©chit plus, on agit en pilote automatique, on prend l’habitude de ne pas observer et exprimer ce qui se passe en nous On s’éloigne de nos ressentis, on s’habitue Ă  des sensations qui auparavant nous dĂ©rangeaient notre seuil de tolĂ©rance change C’est Ă  ce moment lĂ  que le corps s’exprime, il nous rappelle Ă  l’ordre Ces Ă©motions qui ne sont plus entendues vont trouver un autre moyen d’attirer notre attention Maux de dos, de ventre, de gorge, tensions, lassitude, dĂ©prime
 Car, vous l’aurez peut-ĂȘtre remarquĂ©, l’émotion ne vient pas seule, elle s’accompagne toujours de manifestations physiques âšĄïž Ces tensions s’accumulent au fil du temps et crient de plus en plus fort pour se faire entendre Tout ce qui ne s’exprime pas, s’imprime dans le corps Seul, il est difficile de comprendre ce qui se cache derriĂšre nos douleurs, inconforts et difficultĂ©s que nous traversons En sĂ©ance, je vous aide Ă  dĂ©crypter le message, pour vous en libĂ©rer et ramener de la fluiditĂ© dans votre corps et dans votre vie
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Toutce qui ne s'exprime pas s'imprime. 26 vues 0 commentaire. 1 j'aime. Vous n'aimez plus ce post 1. Posts rĂ©cents Voir tout. Cours de natation. LIERGUES đŸ§œâ€â™€ïžCOURS NATATION JUILLET , ENFANTS, ADULTES, AQUAGYM đŸ§œâ€â™‚ïž Bonjour Ă  tous, Parce qu' il est bon de penser que nous avançons Ă  grand pas vers l' Ă©tĂ©. Les prĂ©-inscriptions sont ouvertes pour . 17. 0. " Il existe bien une relation entre les Ă©motions et les maladies. Le corps n'est pas juste un instrument, c'est en quelque sorte le temple de l'Ăąme ou le film de votre vie. Toutes les Ă©motions que vous refoulez Ă  l'intĂ©rieur de vous-mĂȘme parce que vous ne pouvez pas ou ne voulez pas les verbaliser, peuvent se cristalliser dans diffĂ©rentes parties de votre corps. La maladie ou "le mal Ă  dit" c'est tout simplement votre douleur qui essaie de vous dire quelque chose." "L’émotion est la source principale de toute prise de conscience.» Carl Gustav Jung MalgrĂ© le sentiment d'inconfort qu'elle peut parfois vous faire ressentir, voyez-la comme une amie qui vous tend la main et qui vous alerte que quelque chose n'est pas alignĂ© avec vous-mĂȘme et votre nature profonde. Prenez le temps d'Ă©couter ce qu'elle a Ă  vous dire, accueillez-la comme un cadeau, une boussole qui vient vous indiquer que quelque chose a besoin d'ĂȘtre reconnu, conscientisĂ©, nourri, compris, etc .....Comprenez qu'elle se manifeste pour vous enseigner, vous apprendre Ă  mieux vous connaĂźtre. Si au contraire, c'est une Ă©motion agrĂ©able, alors c'est aussi le signe que vous ĂȘtres en harmonie avec vos besoins et c'est tout aussi important de le conscientiser et de vous en fĂ©liciter! DilRJ. 89 321 132 2 250 263 93 167 172

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